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Le Mirebalais Indépendant

La Vie d'ici et d'ailleurs - Patrimoine : d'hier à aujourd'hui, un monde riche de son passé, a forcément un Avenir ...

Publié le par FARFADET 86
Publié dans : #Les clins d'oeil du Farfadet, #La pensée du jour

Réédition d'un article initialement publié le 28/10/2019, 10:44

                 « Ecce Homo... »

Gethsémani - Illustration de Gustave Doré.

Nous avons décrit là, toute l'étendue de la manifestation psychique de l'âme humaine incarnée dans un corps d'homme... L’Être ainsi incorporé dans cette enveloppe charnelle, fut-il Dieu lui-même, passe nécessairement par cette expérience de l'existence terrestre commune à celle de tous les êtres humains nés un jour sur la Terre et en disparaissant un autre jour.

Alors, qu'avec les mots que lui fait dire l'auteure de « Soif », Jésus Christ nous semble raisonner, ressentir, et agir en homme lambda, à cet instant le plus tragique de sa vie, n'a en soi, rien de choquant ni d'invraisemblable, ni de surnaturel. Ayant lu, déjà au premier degré, dans les évangiles ces passages sur la Passion, on doit convenir qu'il n'y a rien de contradictoire et que le déroulement des faits décrits dans « Soif » correspond rigoureusement à ce qui est raconté d'un tel accomplissement, dans ces évangiles.

L'auteure a simplement pris la liberté de faire parler Jésus Christ tout haut mais surtout tout bas, livrant ses pensées, ses sentiments, ses sensations d'homme au moment où il va être crucifié et donc endurer cette terrible épreuve de la souffrance à la fois physique et psychique.

"Pour peu qu'on l'écoute, le corps est toujours intelligent. Dans un avenir que je ne situe pas, on mesurera le quotient intellectuel des individus. Cela ne servira guère. Par bonheur, on ne pourra jamais évaluer autrement que par l'intuition le degré d'incarnation d'un être : sa plus haute valeur."

Tout passe par le Corps, celui-ci est un révélateur, c'est lui le corps qui à soif et c'est elle l'âme qui éprouve la soif... le Corps a ses raisons que l'Âme ne peut nullement ignorer... elles se traduisent en sensations, en sentiments, en réflexions-images...

Et pourquoi le Fils de Dieu lui-même, puisqu'il est dit incarné en tant que Jésus, serait-il épargné par la tentation qui vient du corps ?  Il n'échappera non plus à la mort… on peut lire aussi dans les évangiles ce récit des 3 tentations auxquelles est confronté ce Fils de l'Homme au cours des 40 jours passés dans le désert, juste après qu'il fut baptisé dans le Jourdain.

 

Ainsi, Amélie Nothomb, avec son ressenti de l’Événement, se glisse-t-elle dans la peau de Jésus-Christ et le fait manifester par toutes les voies de l'expression humaine : pensées, paroles, sentiments, réactions, réflexes aussi.

Qui, devant accomplir un tel destin s'achevant par une aussi épouvantable mise à mort, ne réagirait pas comme ce Jésus-Christ qu'elle nous fait côtoyer d'une façon tout à fait réaliste, à cet instant crucial où il va passer de vie à trépas, suivant un rituel spectaculaire devant assouvir la cruauté d'une foule exaltée par l'acharnement des tortionnaires... l’humain faisant face à l'inhumain...

De ce récit bouleversant par l'énoncé des épreuves hautement douloureuses, intimiste par toutes ces révélations du condamné supplicié, ce n'est pas tant ce que les mots nous laissent imaginer jusqu'à nous meurtrir ce que fut cette souffrance, mais ce que cette souffrance a suscité dans l'âme de Jésus Christ qui importe, et que l'auteure met en évidence avec le concours des réflexions habilement imagées et le plus souvent pertinentes.

 

La Rédemption passe par le Calvaire... comment un homme, fut-il « habité » par une haute entité spirituelle, peut-il accepter un tel sort, autant de maux, autant d'indignité, autant de souffrances ? Le corps, c'est lui que l'on maltraite... parce que lui, on le voit... l'âme, on s'en fout, elle ne se voit pas... C'est le corps qui, par la bouche du prophète proférait ses paroles que tous ne comprenaient pas ou ne voulaient pas entendre, c'est le corps qui par le geste avec l'imposition des mains, accomplissait ses miracles inexplicables, c'est le corps qui par les yeux de ce regard à la fois si pénétrant et doux, qui pardonnait aux pêcheurs et pécheresses les actes les plus éhontés et les faisait entrer en rémission, et c'est encore le corps en mouvements brutaux qui, sous la colère, a renversé les tables des marchands du Temple... Ce corps là, il doit être mis à mal... On juge l'homme et c'est son corps que l'on veut anéantir... qu'est donc l'homme sans son corps ?...

Mais que serait aussi un corps sans âme ?...

 

Amélie Nothomb ne s'est pas trompée et est entrée dans cette alchimie du rapport Âme-Corps, pénétrant les processus d'incarnation et désincarnation. Elle a refait « le chemin de croix » en tentant de porter elle-même cette croix... Y a-t-il compassion ou empathie ?...

Alors, parce que le corps est le siège de la jouissance mais aussi de la douleur, Jésus parle et pense avec les mots de tout le monde, le langage est simple, limpide, on comprend tout de cette tragédie humaine. Il y a la sagesse, la pondération, la retenue, des notions philosophiques existentielles qui côtoient ses tourments, sa peur qu'il a de souffrir, ses soifs, ses appétits résultant de cette fusion de l'âme et du corps. Mais, pour qui veut approfondir au-delà des faits historiques, il y a la dimension du mystère qui demeure infailliblement, une dimension que l'auteure comme tant d'entre nous, n'a pas pu envisager, c'est celle de l'Esprit qui déborde largement le corps et l'âme.

Cette couverture !... il faudra m'expliquer ...

Et demeure « l'écorce »... qui sépare, qui isole mais qui ne divise pas...

"Comment s’étonner que la soif mène à l'amour ? Aimer, cela commence toujours par boire avec quelqu'un. Peut-être parce qu'aucune sensation n'est aussi peu décevante. Une gorge sèche se figure l'eau comme l'extase et l'oasis est à l'épreuve de l'attente . Celui qui boit après le désert ne se dit jamais : " Cest surfait" Offrir une boisson à celle que l'on s'apprête à aimer, c'est suggérer que la délectation sera au moins à la hauteur de l'espérance. "

Qu'il est grandiose d'avoir osé nous faire vivre cette « Soif » dans sa réalité à la fois bienfaisante et douloureuse, sans complaisance, nous en apprenant beaucoup sur notre condition humaine et nous invitant à éprouver ce qu'est la Compassion qui veut que l'on souffre avec l'Autre, qu'un temps, on soit l'Autre.

Ce « roman » n'a certainement pas été écrit sans ferveur...

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C
en mon âme et conscience, tout livre lu l'est avec sa propre perception, et ce livre que j'ai beaucoup aimé ne m'a pas semblé aussi mystique ... humain, très humain selon moi, rien qu'humain ...<br /> amitié .
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M
Je l'ai beaucoup lu dans le passé puis j'ai laissé tomber, je ne peux pas lire chaque année son dernier roman, c'est trop pour moi :) Mais en général j'aime bien la lire...
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D
en général, un auteur que j'aime bien
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F
Que serait le corps sans âme? Il rester bien sur à démontrer que nous avons une âme et que ce qui est invisible existe effectivement réellement. L'électricité, l'air sont déjà des éléments de réponse. Je pense qu'un corps sans âme pourrait exister, comme une voiture peut fonctionner, mais une voiture a besoin d'un conducteur et on peut à la rigueur comparer l'être humain comme l'âme de la voiture<br /> Je poursuis: sans corps, il n'y a d'incarnation. C'est vrai.<br /> Il me semble effectivement que la pensée publique, donnant une telle importance au sang, celui-ci ( le sang aurait une valeur purificatrice énorme si le sang versé provient d'une entité spirituelle. Je n'en suis absolument pas convaincu. La Bible dit aussi que le sang, c'est l'âme. Là encore ???? Puisque ce serait l'âme, c'est la raison pour laquelle les Témoins de Jéhovah, à l'instar des juifs et des musulmans ne le consomment pas. Mon éducation n'ayant pas été chrétienne, je n'ai jamais réfléchi à la signification de ce que représente la semaine Sainte<br /> le monde moderne, en effet a dans l'ensemble rejeté toute allégeance à la foi et la science est devenue en quelque sorte la nouvelle religion. Mais savoir n'est pas connaissance et la Connaissance, qui doit effectivement nous libérer de l'obscurantisme dans laquelle nous sommes doit intégrer ce qui n'est pas palpable, ce qui n'est pas visible, ce qui est irrationnel et ce qui n'est pas démontrable. J'espère qu'un jour, des savants moins obtus poursuivront des recherches différentes qui leur permettront d'aboutir à la Lumière.<br /> Oui, c'est à chacun de nous d'être une petit savant en herbe. Oui, nous devons apprendre à utiliser notre liberté pour comprendre, comme tu le dis si bien, la magnificence de l'amour, pour ne pas devenir comme tu le dis, encore si bien, "un corps sans âme
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F
Rebonjour Francis. <br /> C'est bien cela, comme des automates programmés mais ne disposant alors nullement du libre arbitre et surtout dénué de sentiment (éprouver par soi-même) et bien sûr inapte à sortir de son programme... une chose à l'intelligence artificielle et limitée ne pouvant vivre et s'auto-déterminer (sans jeu de mots)... et enfin de compte non dotée d'une "SOI-CONSCIENCE.. associée à une Conscience périphérique du Monde autour de soi.<br /> Quant à l'existence de l'âme , on tombe toujours sur cet écueil récurent de vouloir prouver l'existence de la "chose "ou de l'entité spirituel à la lorgnette du monde physique et temporel. La base d'introspection ou plutôt "l'outil" n'est pas adapté ... ex la pensée la pensée, les sentiments existent manifestement mais nul n'est apte à les percevoir sous une forme physique. Qui douterait pourtant de leur existence puisque l'on réagit face à leur expression ou manifestation ? On saisit une pensée, on la comprend mais on ne la voit nullement ...
F
Je retiens: " la rédemption passe par le Calvaire" Je m'interroge et je me pose la question: la rédemption doit-elle réellement passer par le Calvaire? Je laisse un instant de côté les écrits qui peuvent nous incliner à penser cela et je m'interroge, et je vais peut être un peu dévier du sujet. Avant Jésus, il était préconisé de faire le sacrifice des animaux, pour purifier l'homme ou le peuple pêcheur. L'écoulement d'un sang prétendu purificateur était nécessaire. On peut donc, à la rigueur, facilement admettre que si le sang d'un animal avait la capacité de rendre pur pendant un certain temps les israélites, celui d'un homme dieu pouvait avoir une puissance et une durée illimités. Ce ne serait donc, à première vue, pas le corps qui doit être mutilé, anéanti, mais le sang du corps qui aurait des vertus. Je suis mon raisonnement qui vaut ce qu'il vaut; Bien sur, sang et corps sont liés. je me suis souvent interrogé sur le rôle exact de Jésus, considéré comme le messie, le sauveur, par le christianisme et un homme comparable à tous les hommes par les israélites . Quel était exactement son message? Je sais que je dévie du sujet que tu abordes, Patrice et que je laisse mes pensées aller un peu dans tous les sens. Tu m'en excuseras et tu retiendras essentiellement que je prends à cœur ce que tu écris et ce que Nothomb a publié. Pour moi, la mort de Jésus devait nous inviter à mourir à nous-mêmes., Nous sommes déjà morts spirituellement, et en acceptant de ne porter notre attention que sur la volonté de Dieu qui est amour, en écoutant les conseils "aimez-vous les uns les autres" en mourant à nous-mêmes, c'est uniquement à ce prix que nous pourrions rejoindre l'élite spirituelle, tous ceux qui n'ont pas hésité à donner leurs vies, à être même les martyrs. Pour moi, et j'offusquerai oh combien les théologistes. La véritable église céleste, celle de Pierre, des martyrs, celle de ceux qui ont donné leurs vies pour leur foi, qui ont été persécutés, celle église là est invisible. Pour moi, sur terre, nous vivons une sorte de spectacle constant. Alors, subir un calvaire, pour obtenir une rédemption, oui, pourquoi pas, dans un sens. Ce calvaire, c'est lâcher prise, quant à tous nos désirs, toutes nos convictions, tout ce qui a fait de nous des êtres conditionnés et parvenir à avoir un comportement hors-normes qui nous vaudra l'incompréhension totale, le mépris, des accusations, mais nous élèvera
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F
Francis Dreyfus bonjour et Merci pour ton commentaire. Je constate que ce thème du corps, de la souffrance, du martyre à travers le christianisme, revêt pour toi, comme pour moi une importance capitale. Je pense que tu n’as pas été sans remarquer une question de mon texte : « Que serait le corps sans âme ? »<br /> Sans corps, il n’y a pas d’incarnation et donc pas de possibilité de se lier à la vie terrestre sur le plan physique avec tout ce que cela implique pour une entité spirituelle de se lier à la densité de la matière et ses lois inhérentes.<br /> Il y a aussi le sang et comme tu le mentionnes clairement avant l’ère chrétienne on sacrifiait des animaux dont le sang avait une vertu purificatrice dans l’esprit des grands prêtres sacrificateurs et leurs communautés tribales.<br /> Le sang humain des martyres aurait-il les mêmes vertus et plus encore si c’était une haute entité spirituelle qui s’étant incarné dans un corps humain aurait à en endurer les souffrances physiques tenant aux douleurs infligées au corps ? … Une vertu rédemptrice.<br /> Je pense que l’important dans ce moment crucial de la semaine Sainte, le Vendredi Saint jour de la crucifixion, fut que ce sang humain imprégné de l’aura spirituelle de l’entité christique, coulant jusqu’à terre, s’est lié à celle-ci la revivifiant alors. Le mystère du Golgotha tient à cet événement qui, au-delà du morbide, voulait que le Sang du Christ lié à la substance vivante de la Terre (au niveau éthérique) soit l’élément régénérateur de cet astre porteur de toutes les vies ou plus simplement du VIVANT.<br /> Par la suite, les martyres persécutés qui périrent en sacrifice, sont porteurs des mêmes forces de régénération et donc de Rédemption.<br /> Aujourd’hui, les humains se détournent de plus en plus d’une vie spirituelle et dans nos sociétés occidentales les religions sont de plus en plus décriées comme porteuses de passions et déchaînements. La religion catholique qui longtemps, à travers notre histoire, fut « religion d’État » et donc, (hors dérives qui furent héla nombreuses) porteuse d’une certaine élévation spirituelle de nos conduites à travers nos rapports avec le monde et les autres êtres humains, cette religion de 20 siècles est aujourd’hui rejetée, trouvée hors de sens, obsolète quant à la compréhension scientifique à avoir du monde et de ses origines, voire de son avenir. La foi est obsolète seule compte la Connaissance…<br /> Mais n’y aurait-il pas une possibilité nouvelle pouvant se faire jour en ce XXIe siècle avec l’apparition d’une Science de l’Esprit, cette Haute Instance qui existe déjà dans certaines cellules occultes privées, réservée à une élite sectaire ?...<br /> Aujourd’hui, nous vivons à l’ère de la LIBERTE* et c’est à ce titre que les êtres humains peuvent retrouver leurs origines spirituelles, non par la voie des dogmes mais par elle du choix libre d’entamer un chemin, une quête spirituelle fondée sur tout ce qui s’est inscrit dans l’Histoire de l’humanité et son évolution portée, siècle après siècle, par les forces supérieures du plan spirituel. Le troisième millénaire s’ouvre avec ce XXIe siècle dont Malraux a dit qu’il sera spirituel* ou pas… Reste alors à comprendre la magnificence de l’AMOUR*<br /> *** : La « balle » est dans le camp de chacun de nous… pour ne pas devenir des "corps sans âme" ... 🙂
M
J'hésite encore à faire une critique de ce livre car il touche à l'intime, mais ce qu'en dit Patrice Lucquiaud est émouvant , c'est ce que j'ai ressenti aussi dans ce livre écrit avec ferveur, je suis étonné de tous ceux qui le trouve sans intérêt .Un grand merci PL pour vos belles déductions
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M
Comme je suis heureuse que tu aies lu "Soif" , je te rejoins dans ton analyse sur la grande question que se pose l'auteure, et, qui nous interpelle presque tous à savoir 'pourquoi tant de souffrances alors que Jésus par ses pouvoirs aurait pu éviter' ? Merci Patrice pour Amélie Nothomb, qui me semble, si elle avait lu ce que tu as écrit serait contente, mais je ne suis pas celle-ci. Je suis simplement un peu fan.
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F
Je suis un fan d'Amélie Nothomb; de qui j'ai lu presque tout lu. J'avais l'intention de m'acheter cet opus nouveau. Ce que tu en dis me conforte dans mon envie. Merci de cette longue et savante analyse. Florentin
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B
Extrait de critique de "La Croix" :<br /> * D’aucuns trouveront prétentieux le nouveau livre d’Amélie Nothomb. Pour qui se prend la romancière, qui ose imaginer ce que fut le monologue intérieur de Jésus dans les heures de sa Passion ? D’autres lui reprocheront une trop grande liberté par rapport aux textes du Nouveau Testament, notamment quand elle évoque une relation amoureuse avec Marie Madeleine, ou fait dire à Jésus qu’il n’a jamais prononcé telle ou telle parole contenue dans les Écritures. Mais un roman n’est pas parole d’Évangile.<br /> <br /> Dans ce livre au titre lapidaire, Amélie Nothomb offre une belle réflexion – une méditation ? – sur ce que signifie avoir un corps. Sans corps, on ne peut éprouver de sentiments, faire l’expérience de la soif ou de la mort. La romancière imagine ce qui traverse l’esprit de Jésus dans les dernières heures de sa vie, depuis son procès et jusqu’à son ensevelissement, et même après. Le temps de la Passion ravive la mémoire d’événements, d’expériences, de rencontres marquantes… -*
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D
Ton analyse me semble fort pertinente et m'incite à lire, une fois de plus, cette talentueuse auteure
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Profil


FARFADET 86
Sexe : Homme
À propos : Retraités à Mirebeau* (Vienne), depuis janvier 2005, avec mon épouse, nous étions accompagnateurs de personnes handicapées mentales, ceci pendant 40 ans, dans un Foyer de Vie, en Haute Normandie.

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