Plus qu’une voiture mythique, la 2CV Citroën est une voiture symbole …
Symbole de la démocratisation automobile.
Symbole de la simplicité mécanique et du rudimentaire en matière de véhicule.
Symbole d’une philosophie dans la manière de conduire et de vivre avec son auto.
Symbole de sérénité pour aller et effectuer son travail en voiture.
Symbole d’une jeunesse dans le vent dégagée des artifices de la bourgeoisie.
Si ce n’est le fleuron de notre technologie en matière d’automobile, elle représente ce qu’il y a certainement de plus innovant dans le genre simple … Comme véhicule nécessitant un permis de conduire, elle demeure encore ce qu’il y a de plus spartiate …
Ni belle, ni laide, la 2CV est une auto à part qui se vit au quotidien avec une philosophie d’utilisation et de conduite, bien en marge de ce qui se pratique ordinairement …
Il fallait oser créer une telle auto … Citroën l’a fait… dans l’immédiat après-guerre il a mis au point le prototype réalisé à la fin des années « 30 » et commercialisé avec brio, cette incomparable 2CV, la faisant évoluer pendant plus de 40 ans … Ce n’est ni une gageur technologique ni un pari commercial, mais, ni plus ni moins, que le génie industriel et le bon sens qui ont présidé à l’élaboration de cette aussi originale qu’extraordinaire machine à rouler dans l’espace et dans le temps …
Aujourd’hui, la 2CV est devenue rare sur nos routes et lorsque nous venons à en croiser une, on a tout de suite un regard de sympathie à l’égard de cette vénérable auto en même temps que nous adressons un grand sourire à ses occupants. Toutefois, il n’est pas si loin, encore, le temps où l’on en voyait à chaque coin de rue, car, sur notre territoire, cette petite Citroën fut produite jusqu’en 1988. Au cours de la décennie écoulée, elles étaient encore nombreuses à circuler sur nos routes …
Déjà en 1922, les frères Edouard et André Michelin pensent à la production d’une petite voiture produite en 20 fois plus d’exemplaires que ce qui sort ordinairement des usines de fabrication automobile. … Leur « rêve » en reste là jusqu’au jour ou la maison Michelin, devient propriétaire des usines Citroën suite à la faillite de l’entreprise puis au décès de son fondateur en 1934…
Pierre le second fils d’Edouard Michelin devient le président de Citroën. Assisté de Pierre Boulanger comme vice président, ils vont mettre en œuvre le projet TPV (Tout Petit Véhicule) qui ne coûterait pas plus de 5000 F. , quand, à la même époque, la Traction Avant la moins chère se vend 18000 F. Ce véhicule pourrait transporter quatre personnes, en roulant à 70/80 km/h tout en ne consommant pas plus de 5l d’essence au 100 km. Il est encore stipulé que ce TPV devra être équipé de suspension souple, procurant un confort comparable à celui d’une américaine (décidément… la 2CV, même à sa procréation, ne peut se départir d’une image faisant référence au production du pays de l’Oncle Sam !…) C’est ainsi qu’est établi le cahier des charges, à partir duquel doivent plancher les ingénieurs du centre d’étude de Levallois, dont le réputé André Lefèvre à qui, Citroën doit la révolutionnaire Traction Avant…
Le premier prototype est réalisé en 1936. Pierre Michelin ne le verra pas aboutir, se tuant dans un accident à Montargis à l’âge de 35 ans. Pierre jules Boulanger va donc prendre la relève du projet TPV dont il affine les exigences du cahier des charges en ces termes : « Elaborer une voiture pouvant accueillir à l’aise quatre personnes et 50 kilos de pommes de terre ou un tonnelet de vin, capable de se déplacer à une vitesse de 60 Km/h avec une consommation d’essence n’excédant pas 3 l au 100 … d’un faible coup d’entretien et dont le prix ne dépasse pas le tiers d’une 7CV Traction Avant … Le nouveau patron du quai de javel résume cette suite de données par l’expression fort imagée : « Quatre roues sous un parapluie… » et d’ajouter : en outre, cette TPV devra bénéficier d’une suspension tellement souple qu’il pourra transporter un panier d’œuf sans qu’aucun de ceux-ci ne soit cassé après avoir roulé dans un champ labouré … » Le très bonhomme PJB, demande encore à essayer toutes les maquettes grandeur nature dans lesquelles il compte pouvoir s’installer en ayant gardé son chapeau sur la tête …
Pour les essais, un centre privé avec piste, à l’abri des regards indiscret, est créé à La Ferté Vidame (28) où sont alors testés les différents prototypes produits entre 1936 et 1938… Peu après, PJB demande la mise en fabrication sur les chaînes de Levallois de 250 TPV futures 2CV, de pré série. Le 28 Août 1939, elle passe aux mines… l’agrément de fabrication accordé, la voiture doit être présentée au salon d’octobre 1939 qui, hélas, la guerre étant juste déclarée, n’aura pas lieu … Celle-ci va avoir des conséquences fâcheuses sur ce projet car les troupes d’occupation ne permettent pas aux usines de production automobiles françaises de lancer de nouveaux modèles. Pire, un bombardement, le 3 Juin 1940, détruit le bureau d’étude et les plans qui s’y trouvaient … Néanmoins, pendant l’occupation quelques spécimens du TPV ont été préservés à la Ferté Vidame. PJB et son équipe s’aperçoivent que le coût de revient de ce modèles dépasse de 40% le seuil de rentabilité. C’est en secret qu’ils revoient leur copie et corrigent certains aspects techniques et esthétiques de la TPV. Exit le système de refroidissement par eau du petit moteur bicylindre à plat de 375 cm3, remplacé par un système de refroidissement par air. De même, tout le mécanisme de suspension est revu et est adopté, un système AV - AR interactif à batteurs à inertie. La boîte de vitesse, elle aussi est révisée avec l’ajout d’une 4ième surmultiplié …
Prototype : une suspension qui tient de la balancelle
En 1948, une petite berline de présérie dont le dessin est du au talentueux styliste Flamino Bertoni lequel, avait déjà dessiné la TA et que PJB avait préalablement écarté de ce projet, est présenté à la presse .
Le 7 octobre 1948, s’ouvre le 35ième salon de l’automobile au Grand Palais. La TPV maintenant définitivement baptisé 2CV puisqu’elle entre directement en concurrence avec la nouvelle petite de la Régie Renault, dénommée 4CV, est officiellement présentée au grand public. Toutefois son capot moteur demeure « plombé ». La petite nouvelle venue ne montre pas encore ses entrailles, sinon son habitacle et son coffre toilé d’un seul tenant.
Il y a foule autour de ce curieux véhicule que l’on peut agiter le faisant alors se dandiner joyeusement sur socle présentoir. Curieux, perplexe, le visiteur ne sait quoi penser d’une aussi étrange et aussi spartiate auto … Le prix annoncé de 185 000 F est encore une estimation Une première année se passe où La 2CV n’est pas encore commercialisée mais bénéficie d’ultimes mises au point.
Elle est de nouveau présente au salon 1949, toute semblable à celle présentée au salon précédent à l’exception des feux de positions. Cette fois, les visiteurs peuvent découvrir sa mécanique sous tous les angles puisque sur l’un des modèles présentés, tout le compartiment moteur est dépourvu de son capot.
Commercialisée à partir du mois de juillet 1949, la déjà célèbre 2CV, a séduit plus d’un particulier, commerçant, fonctionnaire en ville ou la campagne. Les carnets de commande s’emplissent à une vitesse inversement proportionne à celle de ce véhicule, au point qu’à partir de 1950, il faut attendre jusqu’à 6 ans pour avoir le plaisir de rouler dans cette étonnante petite voiture …
Moteur :
Puissance fiscale : 2CV
Cylindrée : 375 cm3
Alésage/course : 62X62 mm
Puissance réelle : 9 ch. à 3500 tr/mn avec un taux de compression de 6,2.
Distribution par : par soupapes en tête avec culbuteurs et tiges de commande.
Alimentation : par carburateur Solex 22 ZAC1, avec buse de 16,5.
Réservoir d’essence de 20 litres
Graissage : Sous pression avec circuit comprenant un radiateur d’huile monté en dérivation.
Capacité du circuit : 2 litres.
Refroidissement par air avec ventilateur 8 pales .
Equipements électriques : batterie de 6 volts, 50 ampères.
Allumage à partir de la batterie par bobine à double sortie ; dynamo montée sur courroie en bout de vilebrequin, rupteur sans renvoi d’angle commandé par l’arbre à cames.
Transmission :
Traction avant, avec joints de cardans non homocinétiques .
Embrayage : monodisque à sec
Boîte : 4 vitesses toutes synchronisées avec 4ième surmultipliée + M.A. Levier de commande coulissant au centre de la planche de bord.
Freins :
Hydrauliques sur les 4 roues avec tambour avant accolés à la boîte .
Suspension :
A 4 roues indépendantes avec interactions entre les roues AV et celles de l’AR ; chaque bras de suspension est relié par levier et tirant à un ressort hélicoïdal placé dans un pot de suspension horizontal, disposé longitudinalement de chaque côté du châssis. Un batteur à inertie jouxte chaque roue et l’amortissement est assuré par 4 frotteurs, un par roue.
Direction :
A crémaillère avec volant à gauche. Diamètre de braquage : 10,5 m.
Dimensions :
Empattement : 240 cm.
Voie : 126 cm à l’AV comme à L’AR.
Longueur : 378 cm.
Largeur : 148 cm.
Hauteur à vide : 160 cm.
Pneumatiques : 125 x 400.
Poids à vide ne ordre de marche : 495 kg.
Vitesse maximale 65 / 70 km/h.
Vue générale du châssis plateforme
1 : Bras de supension - 2 :Tirant de suspension - 3 : Pot de suspension
4 : Batteur à inertie - 5 : Traverse d'essieu avant - 6 : Frotteur
Au total, c’est 5 114 951 exemplaires qui furent produit en 42 ans …
Un succès commercial qu’hélas Pierre Boulanger n’a pu connaître, étant décédé le 11 novembre 1950 suite à un accident, au volant d’une 15 Six de la marque au chevron, dans les environs de Gannat …
Ce véhicule au premier abord si ingrat, spartiate, a promené plusieurs générations et pour autant a rendu de multiple services étant un aussi fiable outil de travail, que prestataire de loisirs pour tous ceux dont la philosophie s’appuyait sur cet adage : « Qui veut voyager loin ménage sa monture » Il ne servait à rien de les cravacher, ces deux chevaux là, étaient aussi endurants qu’inusables, menant leur train paisiblement, vous faisant apprécier le paysage …
Merci à Vous Tous, MM Michelin, Lefèvre, Boulanger et à Toutes ces Valeureuses Mains qui ont façonné une aussi sympathique automobile …
Photos scannées à partir des revues "Automobilia" N° 30 et N° 46 ....
Première journée en 2CV
La "Deuche" vue par Koulou : le bonheur automobile !...
Merci Koulou !