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Juillet 1955, Le Mazet-sur-Rourle un village imaginaire de la Provence des garrigues, un homme descend de l'autocar puis, son grand sac sur l'épaule, entame l'ascension du chemin le conduisant au cœur de la bourgade... un adolescent "accroché" à la bride de son singulier attelage parvient à sa hauteur et, lui tient la conversation... Tous, que ce soit ceux qui tapent le carton en terrasse, ou celles qui épient la rue en retrait du rideau de leurs étroites fenêtre, suivent son approche... un homme à la belle stature, qui a le pied sûr sous un soleil de plomb et qui ne fait pas cas pour parler à un simplet plutôt repoussant, comme si il le connaissait depuis des lustres, c'est qui celui-là ?... Rien d'autre qu'un "bomian", un étranger, un rastaquouère, un de ces sujets que l'on méprise autant qu'on le redoute, un individu qui, déjà, n'est pas le bienvenu ...
La chaleur pousse les habitants vers les zones d'ombre, la sueur perle et ruisselle dans le dos au moindre mouvement. La moiteur ramollit les consciences en ça aidée par les successions de verres de mauresques bus avidement à la terrasse du bistrotier Magnant....
Ce qui s'est passé après, eux seuls pourraient le dire, même si au pays tout se sait toujours un peu. Un vent bavard. Des oiseaux rapporteurs . Le murmure de la Rourle. Un pays, ça sait tout, même si ça se tait. Un village c'est pareil.
Seize ans plus tôt à la même saison, dans ce même village, les habitants bravent la chaleur matinale pour vaquer à leurs activités du jour, champêtres pour les hommes, domestiques pour les femmes. Qui, dans cette ambiance estivale, lumineuse, chaudement colorée, bucolique, imaginerait qu'un drame se prépare au cœur de cette garrigue où foisonne la vie sous toutes ses formes... "Un chant du monde" à la Giono... "une chasse à la Bartavelle" à la Pagnol.... Oui, nous sommes bien dans cet univers à priori accueillant, clochemerlesque, un monde rude, beau et égrillard à la fois...
Pourtant c'est une chasse à l'homme qui s'est organisée, fusil à la bretelle la bande à Magnant s'est dirigée vers les hauts de Roucas, Il s'agit de venger l'honneur du forgeron cocufié, sa femme Mireille enceinte est partie avec un saisonnier Italien. Ils se sont réfugiés dans une bergerie en ruine.... Là, à bout de force elle met son enfant au monde devant l'italien désemparé. Deux jours à résister à la douleur et à donner le sein au nourrisson avant de mourir. Les poursuivants les découvre dans cette désolation. Ils n'épargnent aucunement le saisonnier ravisseur d'épouse et l'abattent aussitôt sans aucune pitié... Reste le Petitou tout poissé contre le corps refroidi de sa défunte mère... Quel sort sera le sien face à la brutalité d'hommes haineux ?...
Revenons à ce mois de Juillet 1955 et découvrons les personnages avec, en premier...
- Le Bomian, de son nom Bogdan, la trentaine, chevelure claire, d'origine Albanaise, portant au dos son, grand sac de marin, il revient d'Algérie. Légionnaire, il a fait la guerre d'Indochine où il était ami de Quentin, l'époux de la Lisou, mort à Diên Biên Phu.
- Le Pabeu (Pas beau) est le "demeuré" du village, dégingandé, mal attifé, chasseur de garennes. Aveuglé par son son amour passionné pour la Lisou qui est occasionnellement son institutrice, ce personnage est, de ce fait, comparable à celui d'Ugolin du diptyque "L'eau des collines" de Marcel Pagnol, lui, amoureux fou de Manon, la fille de Jean Cadoret.
- La Bertille devenue folle a élevé Le Pabeu
- La Mathilde mère marquée par le chagrin depuis la mort de son fils Quentin. De longue date elle partage sa couche avec Magnant le bistrotier infidèle...
Encore une histoire de femme ou de dette non honorée. C'est vrai qu'il ne donne pas sa part aux chiens, Monsieur Biagio. Le poker signera sa perte et ses conquêtes féminines ruineront sa réputation. Pour lui, câliner une bourgeoise dans sa chambre ou rouler une paysanne dans le foin de sa grange, c'est faire acte de charité. Depuis longtemps, il s'est donné pour mission de leur offrir à toutes l'amour qui leur manque. Quand le père Benoît lui en fait reproche, l'autre lui répond que Dieu est seul responsable puisqu'il a créé la femme avec deux seins et les hommes avec deux mains.
- Madame la Mairesse, Madeleine Bouvet de Montfort, femme au franc parler, audacieuse, se tenant bien au-dessus des ragots qui laissent entendre qu'elle a la cuisse facile.
- le Père Benoît curé aussi bon citoyen que prêtre confesseur. Souvent dépité par les frasques de ses paroissiens et paroissiennes, il ne manque pas de leur envoyer leurs quatre vérités quand leurs comportements, pétris de bassesses et de vulgarités, sont dictés par la jalousie, l'envie et l'esprit de vengeance.
- Biagio le directeur d'école, coureur impénitent de jupons qui fricote aussi avec la Maire... et lorgne sur la Lisou qu'il aimerait bien mettre dans son lit...
- La Lisou institutrice, jeune et jolie, veuve de Quentin, en plus de sa douleur, elle doit sans cesse se confronter aux regards et attentes amoureuses ou libidineuses des hommes de son voisinage...
- Magnant le cabaretier grande gueule qui bat et trompe sa femme avec la Mathilde
- Les Gitans joueurs de guitares, nerveux du cran d'arrêt.
- Les joueurs de belote plutôt balourds, coureurs de garrigues
*L'essentiel de ce drame se déroule sur quelques jours avec son dénouement au 14 Juillet et son feu d'artifice multicolore...
Verte. Dans la nuit, une rosace couleur de l'espoir enfle au-dessus d'eux. Vert aussi, le Bleu, rouge, jaune. Trois fusées déchirent le silence d'une violence stroboscopique. Le décalage des explosions agite les ombres des restanques de couleurs contraires. Là-bas, le moulin d'Astrelle devient l'antre du diable. La Rourle, brassée de reflets, ondule en serpent maléfique, corsetée dans ses roches. Avant que la nuit ne se referme, le bomian entraperçoit leurs silhouettes qui se déploient pour le prendre à revers. Ne pas rester là ! Bouger! À la prochaine fusée, il se jettera à l'abri d'une ravine.