En toute logique, avant d'entamer la lecture de ce tome II, il faut avoir lu le premier qui conte l'enfance de Lila et de Lena, s'en tenant ainsi à la chronologie des événements et à l'évolution des personnages.
Ici, nous partons de l'adolescence des deux gamines pour, les suivant dans le temps, les retrouver jeunes femmes de 23 ans à la fin du deuxième livre.
Le contexte c'est l’Italie des années 60 nous transportant en Campanie, en Toscane puis en Lombardie. Mais le lieu initial, concentrant tout le mélo se situe à Naples et dans ses environs.
Les deux héroïnes que nous avions quittées à la fin du tome I, sont maintenant adolescentes. A seize ans, Lila se marie avec Stefano tandis que Lena, 1a narratrice dans ce roman, poursuit ses études comme lycéenne.
Deux destins opposés que les événements font tantôt se rapprocher, tantôt s'éloigner pour de nouveau les rassembler. Au défilement des pages, chapitres après chapitre, nous découvrons progressivement chaque pan énigmatique de leur attachement tissé de sentiments à la fois forts et contradictoires. Leurs natures respectives qui les opposent ont l'effet d'un aimant puissant dont les pôles électrisent leur existence avec des effets inverses de réactions induisant vivement leurs déterminations et résolutions.
Lila et Léna ont en commun leurs origines, d'abord la misère tenant à la pauvreté de leur milieu social puis l'intelligence et la faculté d'apprendre aisément à l'école, vive, intuitive et imaginative chez Lila, rigoureuse, émotionnelle mais sans cesse contrôlée chez Léna. L'une et l'autre sont combatives. Lila abrupte et imprévisible est redoutable pour imposer sa volonté, énoncer ses refus et agir en toute liberté ne se rendant jamais tributaire des conséquences que peuvent engendrer ses répartis et ses actes. Lena, plus froide et surtout plus pondérée dans ses réactions et choix, ne s'écarte jamais du chemin qu'elle veut suivre, ses doutes et ignorances rencontrées en certaines circonstances, elle sait s'en faire une arme pour ne jamais passer pour une fille naïve et sotte même quand elle se sent inférieure.
C'est surtout en présence de son amie que Lena doute d'elle-même malgré tout son bagage scolaire et universitaire, Lila qui a quitté l'école à la fin du primaire, lui en impose encore au niveau de son savoir résultant de ses nombreuses lectures et de cette capacité à assimiler des notions abstraites comme en mathématiques, les systèmes binaires. Rien ne déroute Lila jamais déstabilisée lorsqu'on veut l'épater avec le déballage de ses connaissances. A ce sujet, elle ne veut jamais avoir une position inférieure.
Nous sommes en présence de deux chemins différents : Lila avec son niveau d'étude élémentaire va sortir de sa condition misérable en se mariant avec l'épicier Stefano, elle devient une « dame » qui s'habille à la mode, accède au confort de vie moderne, ne manquant plus d'argent, Lena, elles, n'échappe pas à la pauvreté de son milieu familial mais poursuit ses études qu'elle finance en grande partie grâce à du travail effectué en période de vacances. Rigoureuse, studieuse parfois sachant saisir les opportunités, Lena accédera au niveau de thésard universitaire.
Maintenant il faut regarder en direction du décor, de ce qui constitue la toile de fond de ce drame. Dans l'Italie de ces années 60, il y a deux classes sociales : les érudits « aristocrates » ultra conservateurs le plus souvent très aisés et riches et la classe populaire (plèbe) rassemblant des commerçants, des artisans, des petits fonctionnaires et des ouvriers. Dans cette catégorie, certains peuvent, avec un sens aigu de l’opportunité et l'absence de scrupule, s'enrichir sur le dos des autres le « tout-venant ». C'est le cas de l'épicier Stefano et du clan Solara dans ce quartier pauvre de Naples où ont grandi Lila et Lena.
C'est surtout dans la deuxième partie du livre quand Lena entame ses études universitaires, que l'on prend la mesure de l'immense fossé qui sépare ces deux classes : Les érudits riches et influents et la plèbe inculte recensant un grand nombre d'illettrés.
Le raffinement, l'élégance et la suffisance des premiers a pour écho, la vulgarité, la grossièreté, et la vindicte agressive des seconds.
L'auteure nous entraîne à plusieurs reprises dans ces considérations contradictoires en juxtaposant les destins respectifs des deux amies. Grandeur et décadence contre misère et ascension sociale...
Parvenu au dernier chapitre de ce deuxième livre, bien qu'effaré par la situation de délabrement dans laquelle se retrouve Lila face à la réussite de Lena, on est abasourdi par la pugnacité et extrême dignité de Lila.
Il y a bien aussi une histoire de roman dans ce roman.
L'épicentre de ces bouleversements se situe à Ischia île face à Naples où les jeunes femmes passent leur vacances d’Été.
Voilà je n'en dis pas plus, en dépit de certains passages décrivant les états d'âmes de la narratrice que d'aucuns trouveront longs, j'ai énormément apprécié cette lecture attachante, pleine de vie et d'humanité en dépit de la rugosité et parfois de la violence des comportements dont l'origine tient à l'égoïsme des êtres mais aussi à leur aspiration à sortir de leur quotidien médiocre pour être mieux considérés. L'autre nom c'est, sans doute aussi, celui de leurs sorts...
Cliquer pour agrandir la page en facilitant la lercture : "La fée bleue" un conte écrit par Lila encore gamine, dans ce passage, elle le jette au feu // le roman de Lena lui, va être publié et sortira en Librairie. - Encore des situations similaires dont l'issu, par delà le temps, les rend tout à fait à l'opposée l'une de l'autre...
NB : L'ensemble des quatre volumes constituant cette saga au parfum d'Italie contemporaine, présente l’avantage de ne pas nécessairement tous les lire à la suite. Chaque, raconte une époque en rapport avec une tranche de vie ou d'âge. En conséquence, on peut entreprendre, entre, la lecture d'un roman nous entrainant dans un univers très différent. Quand on retourne à cette saga, tout revient vite de ce qu'il s'est passé avant, d'autant que l'auteure, dans sa narration, mentionne assez régulièrement des faits passés trouvant leurs échos dans le présent. Ainsi ai-je entrepris une autre lecture très différente par le contenu et le ton, plutôt originale par ses clins d’œil non dénués d'humour au passé mais aussi à l’actualité. Je lirai le tome III de l'amie prodigieuse plus tard...
L'amie prodigieuse III - Celle qui fuit et celle qui reste - - Le Mirebalais Indépendant
Effectivement, à la suite des livres I et II , le sous-intitulé correspond à ce qui est raconté dans ce troisième opus du roman fleuve d'Elena Ferrante, bien que l'on se demande parfois au dé...
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