Réédition d'un article initialement publié le 20/03/2013.
L’insatisfaction que nous procure au quotidien, l’image reflet de ce qui apparaît de nous et que nous renvoie notre miroir, l’insatisfaction que nous tirons de nos piètres performances liées à ce que nous produisons, bon an mal an, celle, conséquente de nos échecs, de nos absences de réussite, de nos ratés et autres manquements, caractérisent l’esprit de notre temps où il faut tellement être au top dans toutes les rubriques qui façonnent le cadre de notre existence pour se conformer aux exigences de tous les dispositifs de la vie sociale institutionnelle, organisée, hiérarchisée et inconditionnelle.
Pour tous actes de la vie, pour toutes utilisations de ce qui est mis à disposition dans notre environnement, nous avons des critiques à formuler où domine surtout notre insatisfaction.
A l’inverse, aurions-nous matière à être vraiment satisfait de ce que nous présentons à chaque instant, comme image de nous-mêmes quant à son apparence physique, de ce que nous accomplissons comme tâches liées à nos fonctions et devoirs en famille, au travail et de l’assistance envers autrui afin de répondre à leurs besoins ?...
Il y a, d’une part ce que nous sommes en tant que personne, et d’autre part ce que nous possédons comme acquisitions dépendant de nos orientations arbitraires ou intentionnelles, de nos choix, ceux-ci, à leur tour, dépendant le plus souvent de nos ressources tant physiques et mentales, que pécuniaires. Ces dernières nous renvoient aussitôt à nous-mêmes puisque les ressources dont nous disposons peu ou prou dépendent essentiellement de notre engagement dans la vie active d’un part et de notre aptitude à progresser d’autre part.
Et voyez-vous, ces capacités inhérentes à chacun d’entre-nous sont, elles, très diversifiées et surtout pas réparties équitablement. Par nature, certains sont pourvus de dons, voire de talents remarquables alors que d’autres, au contraire, sont affligés de tares considérables qui vont parfois jusqu’à les stigmatiser dans leur apparence physique…
Qui parle d’égalité ici ? Égalité des chances !... Bigre ! Au niveau de l’inné ce n’est surtout pas le cas et en ce qui concerne les acquis encore moins …
Aujourd’hui, la tendance qui veut que l’on reconnaisse et donc accepte toutes ces différences est contredite par ce besoin de vouloir, en dépit de ce constat, la même chose pour tous, ce qui revient à nier ces différences, celles-ci entrainant des grandes disparités dans la manière d’appréhender l’existence et donc de se confronter à son quotidien, cette fois, à « armes inégales »…
Alors, vouloir l’égalité, en niant les différences c’est surtout faire l’autruche, s’illusionner, être à mille lieux d’une compréhension saine et objective de son propre destin …
Voilà, le mot est lâché : destin !… Parce que ça existe ça, un destin ! Vous y croyez vous au destin ? Vous pensez vraiment que c’est du domaine du possible que d’avoir un destin. Alors, si c’est le cas, doit-on le subir ou l’assumer sinon, au mieux, l’accomplir ? Sommes-nous les maîtres ou les esclaves de nos destins réciproques ?…
Lorsqu’on parle de destin, c’est plus dans le contexte historique, à propos d’une biographie, par exemple pour mettre en évidence les paliers successifs et comprendre les enchainements qui constituent le parcours d’une vie déjà accomplie. A ce propos, le destin sert de fil rouge pour suivre les étapes essentielles ou celles, plus critiques, d’une existence… Il est vrai qu’on évoque plus facilement le destin pour les autres que pour soi-même. Parler de son propre destin devient vite une incongruité cela ressort du pédantisme…
Ce concept se fait alors plus concret à travers la rétrospective, ce retour sur images des pans de notre existence mais s’accepte beaucoup moins bien lorsqu’il s’agit d’appréhender l’événementiel de ce qui, du futur, vient vers nous, dans notre présent. S’ajoute cette incertitude de ce que nous élaborons, dans le présent, comme projets à destination d’un futur qui à priori, ne nous appartient pas.
Toutes ces choses de notre vie, sont-elles écrites d’avance ? Telle est la grande et angoissante question qui nous brûle les lèvres quand nous évoquons le destin.
Notre vie serait-elle alors programmée et tous les aléas tenant à notre manière de ressentir, de progresser, d’intervenir au gré des événements, ne proviendraient alors que d’une incontournable fatalité ?
Le Destin devant s’accomplir est forcément une entrave à toute liberté…
Voilà, avec liberté, un autre terme clef ici, ramené dans cette réflexion à conduire sur ce thème de l’existence se devant être programmée à l’avance et dont on voudrait tant tenir les renes dans l’espace temps qui lui est imparti…
Dès lors, il nous faut envisager ce qui semble être notre lot commun à tous les êtres vivants, qui veut que l’existence de chacun soit limitée dans le temps entre apparition et disparition de ce cadre de la vie ici sur terre. Nous naissons… nous mourons, entre, se situe notre espace de vie à parcourir…
Passage obligé par le stade embryonnaire, fœtal, l’enfance avec toutes les phases d’un développement physique, psychique et intellectuel, jusqu’à l’autonomie caractérisée par cette soi-conscience propre aux êtres humains… Cela nous mène à la vingtaine d’années. Un quart de notre existence est vouée à notre construction avant que nous rentrions en scène humainement et socialement …
S’ajoute à cela le tiers temps du quotidien où la nécessité biologique inhérente à notre nature physique et sensorielle, nous contraint de quitter chaque nuit de sommeil, l’espace temps de la vie terrestre …
Vu ainsi, il est difficile de parler de liberté et de libre arbitre alors que nous sommes tenus par ces impératifs existentiels limitant notre durée de vie d’une part et nous contraignant à passer par la case enfance/apprentissage de la vie avec escamotage d’un tiers temps journalier d’autre part.
Liberté ?… Mais, ne sommes-nous pas conscient de cela, ce que faisant, nous fait admettre ces conditions de vie terrestres incontournables et donc nous permet alors, en en tenant compte, d’évoluer et de progresser en parfaite connaissance de causes, en toute lucidité !…
Autre constat … Qui peut prétendre, dans ce cadre de la vie, ici bas, échapper aux contraintes existentielles et à ce qui découle de cette loi immuable de cause à effet ?
Sans parler de devoir ou même de règles de vie, jour après jour, nombre d’actes que nous accomplissons ou n’accomplissons pas, ont tous leurs conséquences …
Je peux, chaque matin, au lieu de me lever, rester au lit… il en résultera toutes les conséquences que vous pouvez aisément imaginer.
M’étant levé, je peux ne pas me préparer de déjeuner et rester le ventre vide …là encore cela aura des conséquences.
Nous pouvons comme cela, des heures durant, énoncer la liste de gestes du quotidien que nous accomplissons pour vivre tout simplement, déjà par rapport à tout ce qui se situe au niveau organique et envisager toutes les conséquences résultant de l’éventualité : j’accomplis, je n’accomplis pas ces gestes.
Bien sûr on peut modeler, nuancer ces interventions obligées du quotidien et les organiser, les programmer les faisant rentrer dans un rythme qui nous met en phase avec nos biorythmes, faisant appel à notre conscience…
Ainsi, nous venons de mettre en lumière cette autre notion qui fait partie intrinsèque de nos existences, la loi de cause à effet …
Récapitulons : Destinée / liberté / Loi de Cause à Effet… Ce sont là, les trois degré d’approche du sens même de la vie …
En quoi cela me concerne ? Que dois-je en déduire ? Comment harmoniser mon existence avec chaque élément de ce triptyque ?
Se pose alors le problème de la prédestination. Venant au monde, sommes-nous déjà programmés, sommes-nous dotés de prédispositions positives ou négatives qui vont induire, voire orienter notre existence ? Avons-nous choisi époque, famille, contexte ou bien est-ce le pur hasard qui prévaut pour constituer, déjà à ses débuts, le cadre de notre existence ?
Si on envisage le cas où tout est déjà orchestré, que reste-t-il alors comme part de liberté pour conduire son existence ?
A l’inverse si notre avenir, en totalité, est soumis qu’au seul hasard, il en demeure une immense frustration pour ne pas dire une profonde injustice… Comment untel né difforme, par exemple, a-t-il pu mériter un tel mauvais sort qui le poursuivra toute sa vie, tandis qu’un autre, né dans une famille fortuné aura tout loisir de jouir du bien être et de la prospérité et quand un troisième est pourvu de dons exceptionnels qui en feront un remarquable artiste ?
Dès le départ de l’existence, on peut vraiment parler d’inégalités des chances, liées à de l’irrationnel. Est-ce vraiment acceptable ?...
Maintenant, si à l’inverse, cela devait être des conditions de vie « méritées » quelle sanctions viennent ainsi nous récompenser ou bien nous punir et en vertu de quoi ?…
C’est bien dans ce cas, que l'on devrait se référer à la loi de cause à effet, celle à faire valoir strictement pour soi-même…
Sans prendre nécessairement ceci pour une assertion, envisageons-le déjà comme une hypothèse…
Vous avez certainement vécu de ces moments pénibles où il nous arrive une succession d’événements qui ne sont pas agréables du tout… « Mais qu’ai-je donc fait pour mériter cela ? », est bien la question que l’on se pose à fort bon escient, tout en pensant que ces déconvenues et autres peines du moment nous ne les méritons nullement tant elles ne paraissent aucunement résulter d’actes ou d’attitudes, voire de pensées qui ne sont pas nôtres… L’important n’est pas de savoir quelles raisons seraient à l’origine de ce qui nous frappe et afflige mais que nous fassions le constat que cela pourrait être nous-mêmes qui en soyons la cause… sans forcément culpabiliser se penser l’auteur de l’impondérable, donne un tout autre relief à ce qui nous est momentanément douloureux. (On pourrait tout aussi bien se poser la même question et avoir la même réaction face à des événements heureux mais là, curieusement, cette question nous vient rarement à l’esprit… il faut croire que nous considérons le bien-être comme un dû…)
L’important tient surtout à la façon dont on va gérer la situation désavantageuse et pénible que nous vivons à ces instants, non en se sentant victime d’un quelconque mauvais œil, mais en y palliant étape par étape le plus sereinement possible… Cela relève du seul positivisme lequel vient là comme un véritable réparateur. La liberté, notre liberté prend ici toute sa place dans la nature des réponses que nous choisissons de donner, en tant qu’acteur principal, à ces événements cruciaux.
Les mois passant, se trouvant alors à distance de ce qui nous était si douloureux, y repensant, on s’apercevra que ce nœud de notre vie, particulièrement indigeste, nous a aussi fait progresser, nous en avons hérité plus de force, plus de maitrise de soi…
Ce qu’il nous arrive de bien ou de mal et de façon souvent impromptue, n’est jamais un hasard, ce que, le vivant, nous en faisons peut, par contre, modifier profondément notre avenir…
Et au milieu coule une rivière ...