1917 ! Année terrible !...
3 ans déjà, que la grande guerre malmène les hommes et les paysages théâtre de leurs combats incessants sur un front de 700 kilomètres...
Imaginez ceux qui sont partis en Août 1914 quittant familles, femmes enfants, pensant en toute confiance, sûr de leurs exploits qu'ils seront de retour avant l'hiver à suivre …
La guerre s'est enlisée dans la boue des tranchées, dédales infernales, dans l'horreur des milliers de corps broyés par les obus et la mitraille, dans le sang poisseux qui rougit la terre, dans le froid et l'humidité qui ronge les membres, dans la puanteur, la vermine et les rats compagnons obligés des soldats qui vivent en permanence dans la fange, dans la peur qui mine le moral des troupes, dans l'horreur du feu des armes et des charniers générés à chaque assaut
Roule le feu, perce le fer, et mord le froid …
Casque sans tête, tête sans tronc, tronc sans ses bras ;
Vision d’enfer, trous de misères, regards d’effroi,
Casque trop clair, rai d’un éclair et succombera…
Boue des ornières, tranchées en terre, rien n’est plus droit
Nuit en plein air, ciel sans lumière, dort sans ses draps…
Roulement de tonnerre, cri des guerrières, signes de croix ;
Ombres fantoches, pluie meurtrière, mains pleines de gras…
Champs ravagés, sillons sans fin, fin d’un endroit…
Rides hideuses, plaies d’une terre, sonne le glas !
Nouvelle tanière, tremble pas fier, l’obus tout broie …
Bulles de glaires, mares de sang, glaise du trépas…
Môles et crevasses, comme taupinières, répit t’octroient ;
Saut des barrières, rafales rasent l'aire, et rebondira…
Pantins rampants, la fondrière, guette sa proie ;
Larmes de chair, jamais cette guerre, ne finira !…
A l'Est, bien au-delà de nos frontières, les combattants russes eux aussi entraînés dans cette folie guerrière, en ont plus qu'assez de cette souffrance inutile, de s'affronter dans une mêlée innommable sur ces champs aux milliers de morts et ce, pour des causes qui ne sont plus les-leurs, soudainement, se mutinent, au point que c'est un peuple entier qui se rebelle contre ses dirigeants et maîtres. La Révolution Russe est en marche et oublie un temps cette première grande guerre.
Sur notre sol, la tragédie s'amplifie suite à une relance de l'offensive décidée par le général Nivelle, au printemps 1917 déclenchant une effroyable tuerie dont la sinistre réputation s'établit sur Le Chemin des Dames... Suite à cette hécatombe, des collectifs de poilus se sont formés. Harassés, minés par les combats, par le vain sacrifice de beaucoup trop de de vies où, chaque jour, par centaines, et parfois par milliers, périssent tant de braves, pour une avancée de quelques mètres, pour une tranchée voisine prise à l’ennemi et perdue de nouveau le lendemain, cette guerre de positions à l'issue incertaine fait trop de victimes, alors ces hommes, à bout de force physique et morale, s'insurgent, refusent de retourner au front.
Chemin des Dames,
Guerre qui clame !...
Chemin sans Femme,
Perdu sa gamme…
Chemin des drames,
Brillent les lames…
Chemin des âmes,
Perdu la trame …
Chemin de flammes,
Enfer qui damne !...
Chemin du brame,
Cris d’amalgame …
Chemin sans rame,
Train des Quidams …
Chemin des blâmes,
Point d’Oriflamme !...
Chemin des armes,
Versons nos larmes …
Pour le haut commandement, cette attitude est intolérable il faut que cessent ces mutineries, toutes ces rebellions spontanées et surtout ce refus de combattre. Très vite se mettent en place les sanctions et un tirage au sort s'effectue dans les rangs des mutins. En conséquence, ce sont plus de 600 soldats qui seront fusillés pour l'exemple... La plus-part n'était ni des lâches ni des traîtres mais des hommes brisés par le quotidien infernal de la vie dans les tranchées sous le grondement incessant des pièces d'artillerie...
Vacherie de guerre ! Et, en plus, ces fusillés, proscrits par la haute institution militaire des Armées, entraînent le déshonneur pour leur famille... une misère !
Supplique contre les belligérants
O bonne Mère !
Vois-les, tes Enfants,
Ces Hommes amers,
Toujours combattant …
Dons à la Terre,
Rejoignent le rang,
Brandissent le fer,
Ces belligérants !
Enfants que tu perds
Déjà, sur le champ,
Renient leur Père,
Oublient leur Maman !
Jouent au mercenaire,
Répandent le sang,
Excitent leurs nerfs,
Tous ces « serre gens » !
N’aiment que guerre,
Relèvent le gant ;
Jamais c’est la « Der »
Pour ces arrogants !
Vois s’ils sont fiers,
Ces « brise parents »,
D’avoir sur pierre,
Leur nom conquérant !…
Œuvre meurtrière,
N’emploie que tyrans
Pour vie entière
Au mal récurrent…
N’y faut manière
Qui, les excusant,
Sert les bannières,
Causes des absents…
Frère du frère,
Toujours, se méfiant…
Frère au frère,
Sans fin, va, défiant…
Si minoritaires,
Sont les malfaisants,
Sur vue planétaire,
Sont omniprésents …
Vertus guerrières
Des « tout puissants »,
Agitent les lanières
D’un fouet cuisant…
Porteurs de misères,
Proscrits mis au ban,
Bâtisseurs de déserts,
Lâcheurs d’ouragans,
Jetez en rivières
Vos crimes déments,
Poussez civières
De Mille tourments…
Face à Lucifer,
Restons impuissants ?...
Et laissons faire
Les faux innocents ?…
O bonne Mère !
Larmes du Liban !...
Reçois la Prière
De tes bons Enfants !
La réhabilitation de ces combattants "fusillés pour l'exemple", avec leurs noms de famille figurant sur les stèles du souvenir, en chaque bourg et village d'où ils sont originaires, est aujourd'hui envisagée et ce ne serait que justice. Eux aussi sont morts pour la Patrie !...
La cour martiale si respectable soit-elle, n'avait-elle pas prononcé trop hâtivement ses jugements à l'encontre de ces pauvres bougres. Cette horrible guerre n’incitait pas ses grands généraux à faire preuve de clémence à l'égard des affaiblis, ces valeureux soldats devenus réfractaires...
Combattants d'Antan
Où courrez-vous hordes bleutées ?
Vous fondre sur le gris horizon …
Ou répandre, hors les tranchées,
Votre sang, sur un coin de gazon …
Que jetez-vous, ce regard d’acier,
Mines blafardes, sous le casque,
Avant que vous vous élanciez !...
Déjà la mort, vous fait un masque…
Ombres qui dansez sur la crête,
Cibles mouvantes, pantins sans fils,
En face, les armes sont prêtes
A faire feu, tirant, dans le « mille » …
Sous un déluge de mitrailles,
Progressez comme automates,
Sautant de fosses en failles,
Espérant que l’on vous rate …
Mangez, rêvez, pensez si peu …
Dans ce cliquetis infernal…
Roule et gronde ce nourri feu,
Vous ralliant à son fanal …
Autour du bourbier immonde,
De sang, de fer et d’argile,
Des fantômes font la ronde
Pour cueillir vies si fragiles…
Et vous voilà, trois rescapés !
Agrippant ce porte lambeaux…
Vous, dans le rang des éclopés,
Serez, demain, porte-drapeaux !…
Aujourd'hui, alors que nous célébrons le 99e anniversaire de l'Armistice, il ne reste plus aucun combattant de cette terrible et "absurde" grande guerre....
L'ignominie perpétrée pendant quatre années mettant en grande souffrance les peuples en confrontation n'a pas suffit, elle s'est encore prolongée dans l'énoncé du Traité de Versailles en 1919, infligeant au perdant une sanction épouvantable pour palier aux "dommages de guerre"... L’Allemagne eut à en payer le lourd tribut dans son économie, dans sa dignité nationale, affamant sa population... pas de pardon, pas de pitié pour l'ennemi qui avait souffert autant que nous sur ces sinistres champs de bataille !...
On ne refait pas l'Histoire !... Alors ne soyons pas étonné qu'un peuple oppressé, humilié, sous la soudaine et monumentale poussée nationaliste que l'on sait, reprenne les armes 20 ans après, engageant une foultitude de nations dans un conflit armé mondial encore plus apocalyptique....
Der des ders, en vient une autre, qu’on n’attend pas…
Tranchées de naguère sont oubliées, roulent les convois ;
Nations en guerre, partout sur terre, ne se comptent pas ;
Familles entières, loin déportées, qu’on ne revoit …
Villes d’enfers, hameaux en flammes, tout y passera ;
Ruines de sang, murs de chairs, peurs d’être une proie…
Le militaire, pas seul à terre, même le civil, en pâtira ;
La fin d’un monde, jet nucléaire, pas d’autres choix …
Hier, 10 Novembre 2017, le président de la République Emmanuel Macron et son homologue allemand Frank-Walter Steinmeier se sont recueillis au Hartmannswillerkopf, lieu d'une bataille sanglante pendant la Première Guerre Mondiale et ont inauguré l'Historial haut lieu de Mémoire de ces combats de l'impossible : "On a massacré" entre 20 000 et 30 000 hommes "sans aucune vision stratégique".
La refondation d'une Europe unie est la meilleure réponse à l'"absurdité" de la guerre, ont affirmé vendredi les présidents français et allemand, Emmanuel Macron et Frank-Walter Steinmeier, en inaugurant ensemble, au sommet d'une montagne vosgienne, un musée historique dédié à une des plus sanglantes batailles de 1914-18.