Réédition d'un article initialement publié le 24/03/2015 à 11:48.
Ces trois voitures d'entrée de gamme, respectivement, des marques : Renault, Simca et Peugeot, ont pas mal de points communs :
- Leur date d'entrée en production et de commercialisation : 1938.
- Leur puissance fiscale de 6 CV les classant dans la catégorie des petites voitures.
- Leur déclinaison de berline, coupé, cabriolet et break
- Leur reprise en construction après guerre.
- Leur architecture à roues indépendantes à l'avant et essieu rigide à l'arrière.
- Leur ambition à être voiture populaire à prix plus accessible pour la classe moyenne de l'époque, constituée, de petits entrepreneurs, de commerçants, de fonctionnaires, d'employés cadres et techniciens.
Mais aussi des différences très identitaires …
Visuellement si, en leur temps, elles affichaient toutes, un style de lignes, moderne plus axé sur les courbes et la fluidité, chacune, au niveau du dessin de carrosserie, a adopté des solutions différentes de ses consœurs. Cela est d'emblée, perceptible en examinant leurs proues respectives.
La Juvaquatre a opté pour des phares encastrés dans la boursouflure du capot moteur au dessus des ailes de part et d’autre de la calandre cintrée à stries horizontales, La Simca Huit, les garde en profil type obus et à glace bombée, indépendant, au dessus des ailes de part et d’autre d’une calandre aux contours arrondis à stries verticales, tandis que la 202 les a inclus comme « jumelés » à vitre plate, sous sa calandre oblongue à stries verticales. Les capots moteurs affichent aussi leur différence, d’un seul tenant il s’ouvre d’avant en arrière façon « crocodile » sur la Juvaquatre, en deux parties, il se relève latéralement sur la Simca Huit, et, intégrant la calandre, il se lève d’avant en arrière sur la 202, dégageant ainsi complètement le compartiment moteur.
De profil, ayant des dimensions similaires les différences stylistiques sont aussi marquées du sceau de leurs constructeurs. Ainsi, la Juvaquatre semble plus ramassée que ses rivales surtout dans sa finition initiale, type coach, à deux portes, ce qui lui sera préjudiciable commercialement, à sa sortie. Renault y remédiera l’année suivante avec l’apparition de la berline à 4 portes. La Simca Huit plus fluide, aux courbes plus douces, aux ailes plus galbées apparaît plus harmonieuse. Le constructeur de Nanterre a opté pour des portières, à poignées verticales, ouvrant, façon « battant de volets » sans montant central, ce qui facilite nettement l’accès à bord. La 202, jouant surtout sur l’aérodynamisme connu sous l’appellation « fuseau Sochaux » style déjà adopté sur son ainée, la 402, demeure plus homogène au niveau du dessin, la particularité tient aux jupes rapportées sur les ailes arrière qui cachent en partie les roues du train postérieur.
La proue de la Juva - couvercle de malle basculant - Ouvrants côté droit de la Simca 8 - Plaque numéralogique avec feux arrière au-dessus de la roue de secours de la 202 , ici, une version découvrable. // - CLIQUER sur chaque illustration pour la voir en entier.
En poupe, les différences sont moins marquées, ayant en commun, une retombée de caisse inclinée (en « talus », suivant le profil arrière). Elles comportent, toutes, la roue de secours, masquée par un couvercle en tôle suivant les finitions, recouvrant la soute à bagage, accessible de l’extérieur, seulement pour la Juvaquatre, en basculant le couvercle de malle vers l’arrière, les charnières se situant au niveau du seuil. Les plaques numéralogiques de la Juva et de la Simca Huit se situent en léger retrait de l’aile arrière gauche alors que sur la 202 elle se situe sur le bandeau au niveau de la ceinture de caisse juste au-dessus de la roue de secours et comporte, à chaque extrémité, les feux rouges.
Ces conduites intérieures sont des « 4 places ».
Ces habitacles sont sobres, juste équipés des éléments de confort, traditionnels, à cette époque. Les planches de bord comportent l'instrumentation regroupés dans des cadrans centraux, unique et semi hémisphérique inversé sur la Juva, rond sur la 202, mais triple et circulaires sur la Simca 8. Les boutons et tirettes des diverses commandes, sont regroupés de part et d'autre des cadrans. Les volants sont à trois branches. Les leviers de vitesses au plancher, possèdent une tringle assez longue et torse sur la Juva. Les sièges en tissu ou skaï sont à armature tubulaire, apparente au dessus du dossier des sièges avant sur la Simca et la Peugeot. Cette dernière est la seule à disposer, en option, d'un chauffage intérieur.
Mécanique et caractéristiques techniques.
Architecture technique de la Juvaquatre - Ecorché technique de la Simca 8 - Châssis et moteur de la 202. // - CLIQUER sur chaque illustration pour la voir en entier.
Qualités et défauts :
- La Juvaquatre : Depuis 1929, Renault ne produisait plus de petites cylindrées et à ce milieu des années « 30 » le modèle de bas de gamme était représenté d’abord par la Monasix puis par la Celtaquatre, des 8CV de 1500 cm3. Le constructeur jugea opportun de proposer une petite voiture populaire de 6CV à moteur de 1000 cm3 destiné à une clientèle bien plus élargie. C’est dans cet esprit qu’à été étudié puis mis au point la Juvaquatre qui innovait avec des solutions techniques nouvelles chez Renault, en adoptant une carrosserie autoporteuse tout acier et des roues indépendantes. Le moteur de 1 litre, lui, était obsolète en comparaison avec ceux du même tonneau de la concurrence, ne disposant pas de soupapes en tête. Sa puissance de 26 Ch. s’est vite avérée faible pour mouvoir allègrement cette auto. Ceci constituant son défaut majeur qui, rapporté à la solution d’une deux portes pour 4 places, lors de sa sortie, a quelque peu rebuté la clientèle pourtant séduite par l’apparence de l’auto. Renault y remédiera l’année suivant sa sortie, en proposant une quatre portes. La tenue de route n’est pas exceptionnelle mais le confort de roulement reste acceptable en dépit de quelques sautillements parasites sur route dégradée. Le freinage non hydraulique reste néanmoins suffisant en rapport avec les performances de l’auto. La qualité essentielle de la Juvaquatre, outre son esthétisme qui plait, tient à sa robustesse mécanique légendaire, une garantie de fiabilité appréciée par l’usager lambda qui peut compter sur son auto au quotidien et en toutes circonstances. Renault apportera régulièrement, à chaque millésime, quelques améliorations singulières qui contribuerons à la longévité dans le temps de ce modèle qui sera produit jusqu’en, 1960 dans sa version break.
- La Simca Huit : La Société Industrielle de Mécanique et Carrosserie Automobile créée en Juillet 1935 était une filiale de Fiat en France. Jusqu’à l’année 1939 où elle devint indépendante sous la seule marque SIMCA. La Simca Huit était donc totalement imprégnée des gênes de son homologue Italienne la Balilla 1100 crée par le constructeur italien en 1937. Ce modèle bien né, dispose d’une mécanique moderne et performante. Un moteur nerveux, associé à une boîte à 4 vitesses bien étagées (1ère non synchro), une suspension originale à bras multiples et amortisseurs hydrauliques, un freinage efficace, une direction pas trop dure sont autant d’atout qui séduisent la clientèle qui loue son confort sa vélocité et sa tenue de route. Ce modèle évoluera jusqu’en 1951 où le dernier millésime, équipé du moteur 1200 - 7CV, s’avère des plus performants dans sa catégorie avant d’être remplacé, l’année suivante par l’Aronde.
- La 202 : Chez Peugeot, elle prend le relai de la valeureuse « 201 » dont la carrière a été auréolée d’un succès commercial sans faille. Empruntant le style « fuseau Sochaux » à son ainée, la 402, la petite nouvelle est vite remarquée pour son look aérodynamique. Les solutions mécaniques et techniques traditionnelles de la marque ne sont pas rétrogrades avec l’adoption d’un moteur quatre cylindres de 1133 cm3 de 6CV disposant de soupapes en tête et d’une culasse en alpax, de roues indépendantes, d’une suspension à lames transversales avec amortisseurs hydrauliques et de freins mécaniques Bendix. Performantes, modernes, confortables les 202 sont appréciées surtout pour leur vélocité en côte. La tenue de route n’est pas des meilleures mais la conduite est facilité par une direction assez douce et un freinage correct. C’est un modèle très apprécié par les femmes surtout dans sa version cabriolet ce qui en, en son temps, en fait la « voiture plaisir » par excellence. Les dernières 202 sortent d’usine en 1949, alors que depuis un an, circulent déjà, les vaillantes 203 - 7CV devant les remplacer.
Déclinaisons :
Coupés, cabriolets, break.,
Juvaquatre : Coupé - Découvrable - Break // Simca Huit : Coupé - Cabriolet - Break canadien // 202 : Cabriolet - Découvrable - Break familial. // - CLIQUER sur chaque illustration pour la voir en entier.
Conclusion : A ce tournant de la guerre, ces trois voitures l’ayant traversée, en dépit de la tourmente, se situent exactement à la charnière de deux grandes époques de l’ère automobile : celle de l’aventure technologique élitiste des pionniers, et celle qu’elles représentent, chacune à ce tournant, sur la voie de la démocratisation automobile. Ayant recours à des solutions de fabrication plus économiques puis, ne craignant pas d’innover techniquement et stylistiquement, ces trois constructeurs généralistes ont bien pris la bonne direction, leur permettant de répondre aux aspirations du grand public qui, après-guerre, attendait ces heures du "vivre mieux" et de profiter de tous les avantages de la modernité. Elles ont, effectivement, ouvert la route en tant que voitures populaires procurant cette joie de vivre libre, toujours plus libre…
Sources : Automobilia N°23 - N°34 - N°42.