L’abbé Pierre, né Henry Groues, (* 05.08.1912 /// † 22.01.2007) plus qu’un apôtre est une des personnalités majeures qui a illuminé de son charisme la seconde moitié du XX° juste passé et donc, y étant intensément actif jusqu’à son dernier jour, devient le porte flambeau de la juste attitude chrétienne et sociale moderne, à cultiver dans les temps à venir, à partir de ce XXIe siècle naissant, point de départ du 3ième millénaire …
Ici, le propos ne sera pas de retracer sa vie dont on trouve le parcours exemplaire autant à travers l’actualité que dans de nombreux ouvrages la relatant, mais soulignant les mobiles, de son action humanitaire, de montrer l’élévation d’une âme à la dignité des justes et des grands bienfaiteurs de l’humanité…
Il est l’exemple parfait de ce que d’être Chrétien implique : la pratique active et féconde de la Charité, non en faisant l’aumône mais en allant « secouer » pour leur ouvrir les yeux, les gens en place du pouvoir, en remuant les masses « endormies » pour les sortir de leur torpeur matérialiste, indiquant à chacune de ces factions, ce qui doit être réalisé dans l’urgence (Hiver 54…)
Oui, devant un tel homme, on se sent bien petit, mesquin, cupide, ridicule quand, bien au chaud chez soi, on crie à l’injustice, au scandale lorsque les soucis, les revers de fortune, les maux petits ou grands qui jalonnent nos existences, procurent soudain, une gène dans nos petites vies paisibles…
Lui, en premier il a perçu le mal être des autres qu’il a spontanément fait sien pour y répondre en guérisseur disponible et efficace…
Sa « colère » légendaire n’était aucunement portée par la méchanceté, ni la conséquence d’un égoïsme contrarié, elle avait pour mission de stimuler nos cœurs endurcis pour relever les manches et agir, en venant en aide à ceux de nos frères que la misère n’a pas épargnés…
Cet homme me fait dire aujourd’hui que sa foi, profonde, sincère n’était pas vaine et que son exemple, vis-à-vis de ceux qui se disent mécréants et qui l’ont aussi en admiration, devrait les aider pour porter un autre regard sur la foi attenante aux diverses formes de croyances et religions et dont la mission première est de permettre à chaque être humain d’établir le pont entre nos origines spirituelles et ce monde matériel, théâtre de toutes vies, vies qui ont un sens dépassant largement les contingences liées aux apparences…
Avant lui, le tumultueux Saint-Martin soldat du Christ, le gai et pétulant Saint François d’Assise, amis des humbles, chantre des plus simples beautés et joies, du monde, Saint Vincent de Paul, le petit frère des pauvres, ont fait merveilles pour nous montrer la route …
C’est bien, en chemin, que les disciples d’Emmaüs ont accueilli, Celui qui leur a ouvert les yeux sur les réalités d’un monde si ancien et si nouveau à la fois qui, au-delà du temps et de l’espace, appartient à l’Éternité …
Au cœur de la misère...
Elle fait parti de nous,
Cette sinistre ouvrière,
Et veut que l'on la loue,
Lui vouant nos prières.
Ceux qui n'ont pas le sou,
Qui mangent la poussière,
Ceux que la vie rend fou,
Tous les traîne-misère,
A rassemblé, le prêtre doux,
Pour secourir leurs frères,
Enlisés jusqu'au cou,
Dans la fange des ornières...
Le mot d'ordre, bel atout :
« Aidez ceux tout à l'arrière,
Miteux et plein de poux,
Dépourvu d’aumônière.
Les plus indigents que vous,
Ont besoin de vos bras fiers !
Pour les sortir de cette boue,
Vous prie d'y faire carrière !
Misérables ou grands filous,
Hommes sans bonnes manières,
Á votre tour, brassez la gadoue,
Pour secourir ces pauvres hères ! »
Voilà qui bien valait le coup,
D’entraîner tels compères,
Qu'on aurait, jadis mis au trou,
Pour leurs envies meurtrières.
Des gars toujours soûls,
Bretteurs qui réitèrent,
Sinistres et vils époux,
Terreurs en leur chaumière...
C'est aussi aux voyous,
Autres âmes incendiaires,
Que sa confiance il alloue,
Et en fait ses missionnaires...
Vieux et jeunes loups,
Rassemblés par la misère,
Font sauter les verrous,
De ses sombres souricières...
Ne restent plus à genoux,
Au bord des cimetières...
C'est en tirant leurs houes,
Qu'ils se penchent sur la terre...
Colères mises au clou,
Retrouvent joies altières,
Vivent leurs levées d'écrous
Sur des champs pas aurifères.
Puanteurs, relents d'égouts,
Retirant quelques affaires,
Hors d'usage par faute de goût,
Ils surmontent ce calvaire...
Récupèrent, rénovent tout,
Ce qui rouille comme fer,
Redonnent vie à des joujoux
Qui, à d'autres, vont mieux plaire...
Et tout cela est parti du courroux,
D'un prêtre engagé : abbé Pierre,
Qui mit la Charité en proue,
Contre la rigueur d'un froid hiver...
Farfadet - Mirebeau le 6 novembre 2015.