Réédition d'un article initialement publié le 24/01/2017, 11:19
Cette série policière qui comporte 6 saisons s'est achevée en 2019
L'histoire de l'automobile c'est 130 ans d'aventures industrielles, sociales et sportives. En un peu plus d'un siècle, ce moyen de locomotion qui, dès la fin du XIXe siècle a supplanté les chevaux de selle et de traits, n'a cessé d'évoluer techniquement, esthétiquement et démocratiquement. De quelques dizaines d'unités produites en 1890, elles sont, aujourd'hui, des dizaines de millions produites chaque année dans les usines gigantesques, réparties sur toute la surface de la Terre. Les voitures particulières ont envahi les villes du monde entier, créant de redoutables problèmes de circulation et de pollution atmosphérique...
En 2017, l'automobile est rentrée dans une nouvelle ère ou le numérique associé à l'électronique, en font un véhicule connecté qui, très prochainement, sera quasi-autonome pour se déplacer, reléguant son conducteur au rang de passager. Ceci, c'est au niveau technologique car, au niveau énergétique et écologique, la production de voitures à la fois propres, et économiques, respectueuses de l'environnement, constitue maintenant le souci majeur de nombre de constructeurs. Parallèlement, l'auto devient la bête noire pour les administrateurs des cités et agglomérations ; on cherche de plus en plus à l'éloigner des centres-villes, à grands coups de taxations et d'aménagements de rues essentiellement piétonnières... l'auto dans la cité, voilà qui se ringardise...
Une page se tourne, l'automobile a certainement atteint son pic démocratique et son utilisation, au niveau des habitudes, est déjà en pleine mutation... covoiturage, copropriété... location ponctuelle ou occasionnelle...
Ceci fait qu'un nombre incalculable de modèles sont entrés dans l'histoire de l'automobile. Parmi eux, celle-ci, à l'allure sportive des années « 70 » la 504 coupé ou cabriolet.
Cette auto serait bien passé aux oubliettes si une série policière ne l'avait remise à l'honneur. En effet, depuis 2013, la série policière « Chérif », chaque vendredi soir sur FR2, le temps d'une saison de diffusion de 10 épisodes, à raison de 2 par soirées, nous présente les tribulations d'un capitaine de police et de sa coéquipière en service dans un commissariat de Lyon. L'originalité de cette série tient a quelques particularités telle que le domicile du capitaine se trouvant juste en face du commissariat, l'antagonisme de ses pratiques pas toujours orthodoxes, en cours d'enquête avec sa coéquipière, la référence aux séries policières des années « 70/80 » très usités par Chérif et surtout sa voiture s'inscrivant avec un charme néo-rétro dans les paysages de leurs déplacements professionnels.
On se trouve bien à notre époque, celle du smartphone tout puissant, mais notre capitaine roule en ancienne. C'est top et ça en jette… Chérif utilise au quotidien une 504 coupé à moteur V6 injection modèle 76... une bagnole qui, malgré ses 40 ans, a encore belle allure et du répondant sous le capot.
Remarque : France-Télévision, à travers ses séries policières, en matière d'autos attitrées à ses enquêteurs, affectionne le rétro :
Dans « Les petits meurtres d'Agatha Christie » le fringuant et très smart commissaire Laurence (Samuel Labarthe) se déplace en Facel Vega...
Dans « Les enquêtes du commissaire Laviolette », (Victor Lanoux) cet honorable et méticuleux retraité de la police, lui, circule en Ford vedette des années « 50 »
Notons que pour ces deux séries ci-dessus, ces modèles anciens, eux, correspondent au contexte de leur époque, puisque les intrigues policières évoquées, se déroulent dans les années 50/60.
Comment, à travers ces choix, ne pas voir un clin d’œil malicieux aux épisodes à succès de la séries « Columbo » cet inspecteur improbable qui, au pays de l'oncle Sam dans les années 70, accompagné de son pépère basset hound, roulait à bord d'une vieille 403 cabriolet quelque peu déglinguée et aussi vétuste que son légendaire imperméable …
Le personnage de Chérif a, en commun avec ce célèbre inspecteur, la décontraction complétée d'une perspicacité qu'alimente sa curiosité pour le détail... Alors cette 504 coupé est-elle bien en phase avec l'allure et les manières de ce capitaine de police.
Genèse de ce modèle.
Retour à la fin des années « 60» et au début des années « 70 »... Le contexte est celui des années de croissance, juste avant le choc pétrolier de 73...
C'est au Printemps 1968 qu'aurait du sortir la nouvelle berline bourgeoise de Sochaux, la 504, devant prendre la relève de sa devancière la 404, elle, née en 1960. Nous savons qu'au mois de Mai de cette année, des troubles sociaux, des grèves et des manifestations d'opposition d'envergure paralysent le pays. La révolution de Mai 68 animée par une jeunesse contestataire qui rejette tous les principes d'une société bourgeoise engoncée dans des valeurs sociales et culturelles d'un autre âge, entraîne aussi le monde des travailleurs qui réclame des augmentations de salaires conséquentes, de meilleures conditions de travail, reconnaissance de leurs qualifications et pérennité de leurs emplois. Cela débouchera sur les accords de Grenelle qui, s'ils ne mettent fin immédiatement à la crise, apaiseront les esprits.
Dans ce contexte agité et de blocage des usines, ce n'est qu'à l'automne que Peugeot sort ces premières 504 des chaînes de fabrication de Sochaux. En dépit de son style bourgeois, cette honorable berline connaîtra rapidement un franc succès appuyé par sa réputation de robustesse, de confort et d'efficacité routière. Le constructeur qui a déjà élargi sa gamme des modèles du niveau inférieur, tel que la 204 en la déclinant en cabriolet, coupé et break, a prévu de poursuivre cette politique avec le niveau 504 et demande à son designer-carrossier favori « Pininfarina » de dessiner un coupé et un cabriolet dans ses bureaux de style. Cette fois, le talentueux « couturier automobile » de Turin ne crée pas un modèle directement extrapolé de la berline mais une auto d'allure sportive aux lignes identitaires entièrement nouvelles.
C'est au salon de Genève de 1969 que sont présentées pour la première fois les 504 coupé et cabriolet de Peugeot.
La magnificence latine - l'élégance française.
Le cabriolet - Premières versions
Au premier coup d’œil, on reconnaît bien la griffe du carrossier italien. Un style élancé des lignes tendues aux extrémités légèrement courbes ou incurvées. Une proue lumineuse sport sans être agressive, une poupe classique dont la seule fantaisie tient aux feux de signalisation (2 fois 3) disposés en biais. Une voiture dans le vent pour profiter, en toute liberté, des caresses de l'air et du soleil estival. Ce magnifique cabriolet est doté d'une capote au maniement aisé.
Avec le coupé, on retrouve les formes épurées du cabriolet, même avec le corps de l’habitacle rigide, on est séduit par l'équilibre des proportions et le dynamisme de ses lignes, quelque soit l'angle sous lequel on observe la voiture. Il y a un côté lisse des surfaces, une maîtrise dans l'harmonisation des volumes qui tiennent de la perfection. A savoir que la plate-forme issue de la berline a été tronquée de 19 cm, ramenant l'empattement à 255 cm et que la voie arrière a été élargie de 5cm.
Grâce à une bonne répartition des masses et une liaison au sol bien étudiée, le comportement routier des deux versions, cabriolet et coupé, reste sain, la tenue de route sûre, l'efficacité du freinage probante et le confort de roulement agréable. Le moteur 4 cylindres qui, jusqu'en 1975, équipe ces deux modèles et dont on a les caractéristiques dans le tableau affiché ci-dessus est initialement le 1,8 litres super carré qui provient des 404 Injection, il développe 90 chevaux DIN mais se montre pas assez vigoureux en reprises. Lui succède un 2 litres plus performant de 104 à 106 chevaux DIN, permettant de frôler le 180 km/h et de gagner presque 2'' au kilomètre départ arrêté, en le réalisant en 32,5 secondes. La fiabilité mécanique est excellente et permet d'envisager d'accomplir un kilométrage supérieur à 200 000 km sans redouter une quelconque panne. Par contre, le traitement de la carrosserie au niveau sous-couche et couches de peinture, s'avère insuffisant, la corrosion pouvant se manifester assez tôt par manque d'entretien ou consécutivement, aux projections résultant du roulage courant.
Tableau de bord - Sellerie en simili ou en velours (pas de cuir) - jante alliage et caractéristiques des modèles équipés du moteur V6 PRV
Après une carrière en demi-teinte s'étendant sur 14 ans, la production des cabriolets et coupés 504 s'arrête à l’Été 1983.
Il en demeure que cette auto bien conçue, sérieuse avait au moins l'avantage d'être produite dans un contexte défavorable où le marché était surtout axé sur les modèles bien plus populaires, fonctionnels et économiques à l'usage. Avec les 504 C, coûteuses à l'achat, Peugeot a eu le mérite d'avoir proposé un des rares cabriolets européens à cette époque des grands chocs pétroliers et de l'inflation galopante de l'ère Giscard...
Que l'on retrouve sur les écrans plats de nos téléviseurs, cette charmante et véloce bourgeoise, pseudo sportive, aux mains d'un capitaine de police, bel et séduisant homme aussi zen que souriant, voilà qui est bien sympathique et donne du relief à cette série policière contemporaine et, semble-t-il, appréciée par un nombre considérable de téléspectateurs
On peut rouler en « ancienne » et être tout à fait dans le vent. Merci de nous faire redécouvrir à travers ces fictions de bonne facture, avec ce policier débonnaire fort avenant, cette jolie voiture qui a fait et fait encore rêver plus d'un automobiliste dont moi "Peugeotiste" de longue date.