Nous fêtons, cette année, les 100 ans de la Ford T … une auto légendaire qui a marqué l’histoire de l’automobile comme étant le premier modèle construit en grande série et produit à plus de 20 millions d’exemplaires en 19 ans de carrière …
Quand, en Octobre 1908 est apparue cette célébrissime Ford modèle T, l’automobile avait déjà un quart de siècle d’existence …
Jusqu’alors, dans ses balbutiements, l’auto allait connaître un essor considérable et de véhicule d’exception réservé qu’aux seuls riches, elle prenait la voie qui la destinerait à tous … Ainsi, monter en voiture, devint de plus en plus populaire …
Mais qu’en était-il de cette vie automobile au début de ce XX° siècle ?
Après avoir fait horriblement peur avec des modèles qui tenaient plus du véhicule hippomobile sans cheval, alors mue par des moteurs à vapeurs et ensuite, par les premiers moteurs à pétrole, ensembles roulants ayant allure de monstre de bois et métal, fumant, trépidant et pétaradant, l’automobile, au début des années 1900, devint sujet de curiosité, puis d’admiration, car ses performances se sont mises à évoluer à la vitesse grand V …
Quand, en 1895, un phaéton de Dion atteignait péniblement le 25 km/H ou qu’une Panhard Levassor quadricycle se targuait de maintenir 17 Km/h de moyenne, dix ans plus tard, les bolides qui participaient aux premières grandes courses sur routes (pas encore goudronnées…) atteignait déjà le 140 km/h … En 1903 lors de la course Paris-Bordeaux qui en fait aurait du aller jusqu’à Madrid, les monstres mécaniques de l’époque parvenaient à faire du 105 km/h de moyenne !...
Oui, l’auto de ce temps là, était loin d’être confortable … d’abord parce que les carrosseries étaient ouvertes, et donc, vous voyagiez en plein courant d’air ce qui nécessitait d’avoir un équipement vous protégeant non seulement des intempéries mais aussi de la poussière et de toutes les projections résultant de votre passage ou de celles provoquées par le véhicule qui vous précédait, sans oublier les insectes de toutes espèces que l’on pouvait gober allègrement … Les bolides mentionnés plus haut, n’avaient même pas de pare-brise. Il faut ajouter à cela les trépidations du au fonctionnement de moteurs énormes (sur les voitures de course ils pouvaient atteindre la cylindrées de 14000cc) à transmission par chaîne (silencieux… vous vous en doutez…), la sécheresse des châssis rigides nantis de suspensions fort rudimentaires attenante à des roues gigantesques en bois et à bandage caoutchouc ... C’est à cette même époque que sont apparus les premiers pneumatiques lesquels ont longtemps fait pester les pilotes et mécaniciens à cause de crevaisons à répétition … Bref, une course automobile tenait autant de la grande aventure que de l’exploit physique, lors de ces courses d’endurance où les mécaniques et les hommes étaient sollicités jusque dans leurs derniers retranchements …
Parfois la tragédie était au rendez-vous comme en 1903, l’accident de Couhé-Vérac qui coûta la vie à l’excellentissime pilote et nouveau constructeur Marcel Renault.
Au cours de ces mêmes années, l’automobile destinée qu’aux seules familles très riches, n’était guère plus confortable et ses occupants devaient subir à peu près les mêmes nuisances que celles évoquées ci-avant, n’ayant comme seul avantage que des sièges plus nombreux et cossus… Quand, enfin, les premiers pare-brises équipèrent ces autos, le genre torpédo fut alors très prisé et demeura le style de carrosserie le plus courant jusqu’au milieu des années « 20 » . La torpédo, voiture entièrement découvrable, dispose d’une capote repliable qui, lorsqu’elle était dépliée et fixée, ne procurait qu’un abri sommaire en cas d’intempérie, il n’y avait rien protégeant de chaque côté du véhicule les passagers qui avaient pris place à l’intérieur…
En conséquence il fallait disposer nécessairement d’un équipement approprié pour voyager en auto, cela allait des lunettes de protection en passant par des moumoutes ou grosses canadiennes, des casques pour les chauffeurs. Les passagères revêtaient de grand voilage sur leurs coiffes ainsi que des grandes blouses « pare-poussière » pour protéger leurs vêtements … Un véritable harnachement d’apicultrice, sans nul doute, rendu indispensable du fait que les moteurs de leurs incroyables montures, bourdonnaient comme ruche…
Je me souviens qu’un jour d’été en 1953 du temps où mes parents tenaient un garage à Lesparre, nous étions allés à la pèche dans un etier, du côté de Saint Vivien en Médoc. Nous y étions allé en torpédo Ford modèle A de 1928 … Et par cette chaude journée ensoleillée, nous circulions capote repliée… Ainsi, nous traversions la campagne à 50-55 km/h profitant à plein poumon du plein air marin lequel faisait flotter tel un drapeau, le foulard de ma mère placée juste devant moi … A l’arrière, les tourbillon d’air, s’associant aux trépidations de l’engin, ne parvenaient pas à couvrir le bruit du moteur, haletant dès le moindre faux plat montant… A part cela nous disposions d’une vision panoramique sur le paysage environnant... Je me souviens que m’étant retourné, j’ai pu voir une file d’au moins 15 voitures qui nous suivaient, attendant de nous dépasser, ce qu’elles faisaient en vrombissant rageusement, dès que la visibilité et la voie, en face, étaient dégagées. Oui, dans les années « 50 » une automobile récente, de moyenne cylindrée, pouvait croiser régulièrement à un bon 90 à l’heure… Notre « Fordasse », de 25 ans d’âge, faisant du 55 en pointe, était vraiment véhicule lent … pas rapide mais tellement dans le vent !…
Photos et dessins scannés à partir de " l'illustration"