Les tranchées où le spectre de la mort soudaine scelle des liens forts d'amitié et de solidarité comme pour Blake et Schofield.
Ce film de Sam Mendes était diffusé hier soir sur F.2
Il y a 105 ans, les tranchées du front ouest, dans le Pas de Calais, deux bataillons anglais du régiment Devonshire font face aux assauts et incessants pilonnages de leurs homologues ennemis. Le combat fait rage, mais voilà que les Allemands se retirent sur la ligne Hindebburg délaissant le vaste réseau de leurs tranchées.
Des photographies aériennes montrent que c'est un subterfuge pour inciter les Anglais à les attaquer afin de mieux les décimer en les faisant s'embourber dans le no man's land truffé de cratères, de barbelés, de matériels de guerre détruits, de mines, de cadavres, et de rats.
Deux caporaux suppléants amis Schofield et Blake sont chargés d'une mission périlleuse pour porter un message important au commandant en chef du deuxième bataillon, coupé du premier, puisque les lignes de communication ont été anéanties par les bombardements successifs. Ils devront parcourir une quinzaine de kilomètres en franchissant d'abord le no man's land d'un paysage dantesque, parcourir les tranchées allemandes désertées mais minées, pour atteindre les environs d'Écoust-Saint-Mein où stationne le Bataillon du colonel Mackenzie.
Le réalisateur a eu recours aux plans-séquences qui accentuent les effets dramatiques du scénario. Cette mortelle expédition est haletante, le rythme tantôt précipité se faisant au pas de course, tantôt figé sur un plan rapproché où l’expression des visages combine sentiments angoissants, pulsions de vie et élans de survies, ce film de guerre est certainement le plus prégnant au niveau émotionnel que j'ai pu voir sur la première guerre mondiale. L’environnement, défiguré, meurtri, broyé, crevassé, putréfié donne une vision de ce que peut être l'enfer sur terre où la boue s'imprègne des chairs et du sang des cadavres, monde hérissé de fers, de ruines en flammes où l'humain ne saisit plus rien de sa raison d'être.
Et pourtant en émerge une véritable humanité. Elle survit à tout ce périple infernal aux frontière du mal, elle ne quitte jamais ces deux soldats héroïques qui ne cachent pas leurs peurs et leur effrois, qu'ils dépassent en allant toujours en avant dans ce décor apocalyptique. Un seul parviendra au but accomplissant dans la souffrance aux prix d'efforts surhumains, la mission salutaire qui évitera le carnage.
La dernière image du film tire les larmes des yeux et du cœur... Dieu ! quelle folie saisit donc les hommes pour les entraîner dans une telle dévastation qui leur fait perdre l'essence même de la vie, de la civilisation et de leur dignité humaine.
Et 105 ans plus tard, les mêmes erreurs, les mêmes horreurs, ne sont, hélas pas, que celles vues au cinéma !