Alors que certains intellectuels très tendance, s’emploient à démystifier les légendes de notre histoire, liées à l’existence de personnages célèbres, remettant en cause leur rôle et la pérennité de leurs œuvres ou de leurs missions, sur les rotatives des super éditions, sortent les millions de pages d’une littérature fiction dont vont se repaître autant de millions de lecteurs, dont moi…
Cette 7ième édition des aventures extraordinaires et suprasensibles d’un jeune apprenti sorcier, sorties de l’imaginaire fécond et dantesque d’une romancière fort talentueuse, après 6 tomes à succès, vont une fois de plus enchanter, envoûter un public de lecteurs et lectrices passionnés, constitué par presque plus d’adultes que d’enfants…
Encore un paradoxe de notre temps…
D’un côté on a des spécialistes brillantissimes et éminents experts de l’histoire qui vous apprennent que notre Jeanne d’Arc nationale, n’était ni la pucelle ni l’héroïne martyre que l’on croit ou bien que ce n’est pas Molière qui est auteur de ses œuvres et, de l’autre, on a un adolescent binoclard plein de fougue qui, d’un coup de sa baguette magique, transforme toutes les apparences d’un monde ou le merveilleux surréaliste se superpose à la réalité tangible dans un déferlement de forces surnaturelles produites par des êtres fantasmagoriques, sortis tout droit, d’une mythologie débridée …
A la lecture, les phénomènes paranormaux nous deviennent si familier qu’on ne s’étonne plus qu’une voiture vole, qu’un rat soit la métamorphose d’un petit homme démoniaque, qu’un phoenix renaisse de ses cendres, qu’à des vitesses quasi supersoniques, on traverse l’azur à califourchon sur un balai, qu’on voyage dans le temps et l’espace en franchissant tous les obstacles naturels les plus consistants, qu’on transplane, se désintégrant puis se reconstituant matériellement, après avoir franchi en un éclair, des distances faramineuses …
Oui, tout cela, on croirait presque que ce fut du domaine du possible mais que la Jeanne d’Arc, cette pucelle naïve, attachée à ses visions célestes, ait pu, à la tête d’une armée remise par le petit roi de Bourges, bouter l’anglais hors du royaume de France pour finalement être prisonnière puis condamnée au bûcher, ça tient du mystère fort gênant pour l’honnêteté intellectuelle des grands penseurs méticuleux et historiens tatillons du moment …
De même que Molière ait eu une plume aussi féconde, tout en étant acteur de grande envergure, promoteur de son théâtre mais aussi serviteur dévoué, grand organisateur des loisirs culturels d’un roi rayonnant sur sa cour, est invraisemblable et donc, inadmissible, intellectuellement …
Voyez-vous, là, pour ces personnages, il y a un doute qui ne peut nous faire admettre comme réelles et authentiques, leurs œuvres ou leur accomplissement en tant que héros, lesquels dépassent l’entendement. Démystifions, démystifions à tout va… mes bons amis !...
Dois-je aussi mentionner les révélations prises à la lettre, par bon nombre, au sujet de certains aspects de la vie de Jésus Christ, révélations élaborées dans les écrits du roman à succès de David Brown dans son "Da Vinci Code" ?…
Mais pourquoi donc faudrait-il que des personnes illustres, s’étant manifestées par l’extraordinaire de leurs œuvres ou, magnifiées par leurs propos, soient, comme le commun des mortels ? On dirait que ça dérange les gens de notre temps, que l’on, vénère et respecte tout ce qui nous entoure, que l’on aime de manière idyllique son prochain, au point qu’on peut aller jusqu’à sacrifier son existence à de grandes et nobles causes, que pour ça, l’on vive en ascète et que l’on ne soit pas soumis à ses pulsions bestiales, les surmontant, les sublimant …
De ça, nos esprits rationnels ne veulent pas mais, d’un petit sorcier magicien prodigieux qui refait le monde à partir de modèles réfléchis par un miroir magique, là, on souscrit et on en redemande …
Il est curieux de constater que nos contemporains ont inversé la donne :
Aux enfants on ne raconte plus des histoires, car le plus tôt possible, avant même qu’ils n’aient atteint l’âge de raison, il importe de les confronter à la réalité. Par contre les adultes, eux se repaissent de fictions et de tout ce qui relève d’univers virtuels.
N’est-ce pas là un monde à l’envers ?
Il me semble que c’est important et bougrement formateur, qu’au cours de l’enfance, on enchante cette dernière avec les contes issus de l’imaginaire traditionnel ou en leur présentant de grandes figures légendaires… Autrefois, cela se transmettait, hors lecture, au cours des veillées, de vive voix, de bouche à oreille, sans tous ces artifices visuels, exacerbant le sensationnel.
Aujourd’hui, tandis qu’à leurs enfants les parents s’acharnent à montrer et expliquer les réalités de la vie, eux les grands, ces adulescents, s’épanouissent dans la culture où la réalité de leur quotidien est transcendé par l’abondance des fictions les plus fantasques, en marge de toute vraisemblance et de ce qui peut être tenu pour raisonnable.
Oui, de nos jours, beaucoup d’humains ne croient ni à Dieu ni à ses Saints, mais bien plus volontiers aux lutins, et en toute bonne conscience, ma foi !… (Oui, je sais, disant cela, vous pouvez très bien douter de mon existence en tant que farfadet …)
Vous me direz que ces adultes, si friands de ces fictions où l’extraordinaire est déifié en bien ou en mal, savent, en majorité, fort heureusement, faire la part des choses, en revenant à la réalité …
A cela je répond : observez, autour de vous, venant de vos contemporains, les comportements, les mobiles de ceux-ci, les raisonnements pour les justifier, et vous constaterez que, sur le nombre, il y en a de plus en plus de délirants, d’absurdes de déjantés, comme on dit …
Le pire, c’est que l’on s’étonne et que l’on s’offusque quand certains « pètent, les plombs » …
Dans tout ceci, il en demeure que l’on aimerait bien connaître les raisons sublimes qui régissent notre monde des apparences et, pour ça, nous n’hésitons pas à créer des univers parallèles et fantasques, où la baguette magique d’un jeune sorcier opère des miracles et fait s’animer, dans une gerbe d’étincelles éblouissantes, sujets et objets d’essence spirituelle quasi divine…
Un monde sans mystère serait comme un œuf sans coquille … informe et inconsistant … de ce fait, nous sommes bien entourés de mystères … "oeuf course" ...
Farfadet le Moldu …