A Mirebeau, pendant plusieurs années, au mois d'Août, s'est tenue la grande foire aux ânes… Cette concentration de l’espèce asine tient ses origines d’une ordonnance du roi Louis IX qui, en l’an 1270, met le pays Mirebalais en concurrence avec le pays Mellois pour en faire un lieu de commerce de Baudets et Mulets du Poitou.
Cela fait maintenant plus de 30 ans que cette manifestation a été réactualisée à l’occasion de la Saint-Louis fixée à la date du 25 août sur le calendrier…
En raison des progrès techniques et de la mécanisation généralisée à toute l’activité agricole, bien plus exposée à la disparition que la race équine, l’espèce des baudets était, elle, en voie d’extinction définitive. Cet animal n’ayant plus de service à rendre aux humains, disparaissait à la vitesse grand « V » de nos campagnes se désertifiant elles aussi… Cette progression désastreuse, à l’issue irréversible fut interrompue par le regain d’intérêt des haras nationaux et de quelques rares éleveurs pour cette race particulière, coïncidant avec le développement des activités de loisirs en milieu rural. On doit donc au tourisme et au sport, la sauvegarde généralisée de l’ensemble des espèces équines et asines…
Avant les années « 80 », la réputation faite à la citée de Mirebeau par ses foires aux ânes associé à la modernisation du monde agricole, avait fait tomber dans l’oubli, cette spécificité locale au moins en tant qu’activité économique. Toutefois, elle n’avait pas disparu de la mémoire collective …
Dans les années « 50 » et « 60 », chaque mercredi, la mère « Brav’homme » de Poligny, venait vendre les produits de sa petite exploitation avec sa petite carriole tirée par un âne. L’attelage pittoresque était bien connu dans la région et faisait le bonheur des enfants autant que des visiteurs de passage dans nos murs…
L’âne était souvent employé à la traction de charrettes légères, ou bien bâté, effectuant surtout des travaux harassants contre une pitance rudimentaire, cet animal ayant un appétit frugal… Et cela remonte à la nuit des temps…
Comparé à son cousin le cheval, l’âne a piètre réputation ; pour le premier, la noblesse de son allure lui vaut d’accomplir des tâches valorisantes, pour le second, son allure plus pitoyable, son air triste, lui valent les basses besognes. Le premier est honoré, le second est le plus souvent raillé…
Le nom d’âne attribué à l’humain n’a rien d’élogieux, on sait cela à travers moult expressions : Accomplir une ânerie – être têtu comme un âne – Faire l’âne pour avoir du son – Il y a plus d’un âne à la foire s’appelant Martin – âne bâté – bonnet d’âne – oreilles d’ânes – Haro sur le Baudet !... La légende également ne lui fait pas la part belle si on s’en rapporte par exemple de cette fable de la Fontaine : « les animaux malades de la peste » où le fait d’avoir brouté une seule touffe d’herbe d’une pâture interdite est jugé par le tribunal des bêtes comme crime le plus abominable comparé à ceux meurtriers des carnassiers …
Pourtant il est une chanson un peu triste, il est vrai mais qui lui rend justice, au moins, en ce qui concerne son existence honorable : Le petit âne gris.
Dans le Nouveau testament l'âne est présent au début et à la fin de la vie de jésus. Il se tient dans la crèche, à la naissance du Messie. Ensuite c’est lui l’âne, qui porte Marie et l’Enfant lors de la fuite en Égypte. Et, au début de la semaine sainte, prélude d’une fin proche, ce jour des Rameaux, c’est bien sur le dos d’une ânesse que le Christ fait son entrée dans Jérusalem...
En fait, cet animal dont on s’est tant moqué à travers l’histoire, possède donc ses lettres de noblesse et a pour vertus son humilité et son paisible courage. Sans son côté obstiné que l’on porte à sa charge, ( au propre comme au figuré…) cet animal rustique n’aurait certes pas accompli les multiples tâches rebutantes et ardues que l’homme lui confiait.
Aujourd’hui, dans notre monde ultramoderne, il reprend sa place parmi les humains, plus comme animal de compagnie, que comme bête de somme. Ainsi, à la Saint Louis, c’est bien sympathique de retrouver en nombre ces vaillants quadrupèdes sur le foirail de Mirebeau.
L’UPRA (Union Poitevine de promotion de Race Asine), il y a un peu plus d’une trentaine d’années, tira la sonnette d’alarme face à l’extinction progressive de la race des ânes poitevins, on ne recensait plus alors que quelques dizaines d’authentiques baudets. Malgré ses qualités d’endurance, de ténacité, de robustesse, l’âne du Poitou possède aussi quelques faiblesses dont un taux de mortalité élevé à la naissance (presque un sujet sur deux), les portées n’étant réduites qu’à un seul élément et, la consanguinité, devant surtout être évitée … Il a fallu beaucoup de persévérance et d’amour pour ce merveilleux baudet, de la part des éleveurs qui se sont intéressés à son sort, pour en faire proliférer l’espèce. Le baudet a besoin de soins rigoureux et constants… Il faut également savoir que ces éleveurs ne reçoivent jusqu’à présent aucune aide de L’État et ce, malgré que l’âne du Poitou soit répertorié et reconnu par les haras nationaux…
Il faut mentionner qu’aujourd’hui, une ânesse de pure race poitevine vaut de 20000 à 30000 € et, un ânon issu de cette race des baudets, peut se négocier entre 4500 et 8000 € … En 1925, le vétérinaire asinologue Sausseau disait de l’âne du Poitou qu’il ne pouvait être confondu avec aucune autre race commune d’ânes et qu’il représentait l’aristocratie de l’espèce asine. Il était si rare et tellement coté, qu’avec le bénéfice de la vente de deux sujets aux réelles qualités mulassières, on pouvait, à cette époque, acquérir une ferme, terrains et bâtiments compris …
Il y a actuellement plus d’une centaine de propriétaires de baudets, en Poitou-Charentes et environ 850 sur l’ensemble du territoire français et, autant à l’étranger. Le baudet a été exporté entre autres nations, vers le Maroc, les USA, le Canada, le Brésil, le Japon, l’Inde et la Chine, au total une vingtaine de pays où il est apprécié pour effectuer des travaux agricoles ou bien, comme porteur de charges.
Parmi ces éleveurs, nous avons à Mirebeau, un ancien poissonnier à la retraite qui, depuis une douzaine d’année, avec son épouse, ensemble, élèvent des baudets. Michel et Jacqueline B. possèdent 4 ânesses du Poitou aux merveilleux noms d’oiseaux : Perruche, Hirondelle, Mésange et Palombe. Au concours de cette année, ils présentaient Perruche, ânesse de 5 ans et de 1,50 m au garrot. Il s’agit, pour 2008, de la faire passer en livre A (1ière catégorie). Cette admission est la conséquence d’un long croisement d’ânes 100% pure race avec des ânesses qui le sont moins. Mais celles-ci, pour être classées en livre A, doivent être pures, au moins, à 92,5% …Actuellement, propriétaires de 7 baudets dont les quatre ânesses citées, Michel et Jacqueline, au cours de 12 années, ont obtenu, 7 ânesses et 7 ânes issus de leur élevage…
Il y a aussi, à l’entrée de Cuhon, au sud de Mirebeau, deux autres célébrissimes ânesses : Isis et Hétaïre, baudets femelles qui partagent leur pâture avec Futaba une ânesse commune et Quisny, une brave jument. Cette petite communauté fait dans l’ensemble, bon ménage sous la surveillance d’Isabelle B qui en a la charge et les soigne avec amour. Avant, les deux ânesses demeuraient à l’étang de Saint Martin mais, les employés communaux qui devaient s’en occuper, ne pouvaient assurer un suivi rigoureux. La communauté de communes ayant lancé un appel d’offre pour s’occuper de ces deux magnifiques ânesses, c’est à Isabelle qui avait postulé, qu’elles furent donc confiées. Maintenant entre de bonnes mains, Isis et Hétaïre sont vraiment fringantes et l’on vient de loin pour les voir …
Ces animaux sont vraiment affectueux, nullement têtus mais ont bien sûr du caractère. Pourvu que l’on ait bien observé comment ils fonctionnent, on peut, dès lors, en obtenir tous les services souhaités…
Caractéristique du Baudet du Poitou : Taille au garrot : 1m40 pour la femelle, 1m50 pour le mâle. Sa toison devient épaisse, de couleur baie, parfois jaunâtre mais ne doit jamais être parsemée de blanc. On accepte que ses poils longs s’entremêlent et lui donne l’aspect guenilleux, le rendant encore plus pittoresque. Le Baudet est donc haut, sur ses membres vigoureux aux articulations robustes et dont le pied large est garni de poils. La Tête longue est surhaussée de grandes oreilles velues écartées parfois presque retombantes.
Autrefois, comme reproducteur que l’on croisait avec des juments de la race mulassière, il produisait des mulets puissants et massifs de taille de 1M7O au garrot et atteignant un poids considérable de 600 à 700 kg.
Notions à retenir :
Le mulet est le fruit d’un accouplement d’un âne et d’une jument
Le bardot est le petit issu du croisement d’un cheval et d’une ânesse
Le bourricot ou bourriquet est un petit âne.
Le terme de bourrique s’adresse tant au mâle qu’à la femelle de l’espèce des ânes et aussi des humains au caractère têtu…
Toutes les races et variétés d’ânes sont issu de l’originaire l’âne de Nubie.
A la Saint Louis …
Au jour de la Saint Louis,
Qui fait foire au pays,
Tout Mirebeau se réjouit
Du très ancien édit ...
Rassemblement des ânes,
En pays Mirebalais …
Maquignons, à vos canes,
Poussez-nous bien l’baudet !...
Voyez sur le foirail,
Ces baudets concentrés,
Ont sorti du bercail,
Les badauds d’la contrée !...
Aujourd’hui c’est la fête,
Y a tant de guenilloux,
Qu’aucune sonnerie d’trompette
Contre braiement n’vaut l’coup !...
On dit l’baudet têtu
Ce serait là son défaut…
Mais ont d’autres vertus,
Ces si doux animaux ...
L’âne qui nous tient tête,
N’a rien d’un canaillou,
S’il sait faire la bête,
Ce n’est pas autant qu’nous !...
Pas mieux qu’une carotte,
Présentée sous l’fanon,
De furieux coups de bottes,
F’ront avancer l’ânon !...
Parlez-lui à l’oreille,
Il a grande l’écoute ...
Il n’aura son pareil,
Pour se remettre en route !...
Car c’est avec douceur,
Et nul autre détour
Que l’on met au labeur
Notre baudet d’amour !...
Sachez faire diligence
Ne vous donnez de mal
Grande est l’intelligence
De ce doux animal ...
Farfadet l'ami des Baudets ...