"Tout est perdu... "
J'ai vu ce film diffusé mardi soir, sur Canal +.
C'est un sacré moment de tentions intenses à passer car on se trouve en totale symbiose avec le navigateur aux prises avec son voilier en perdition.
Un seul acteur, Robert Redford (77 ans) dans le rôle d'un vieux skipper expérimenté qui affronte les aléas de la navigation et les éléments déchaînés avec une pugnacité sans faille.
Pas de dialogue, hormis les quelques minutes de « voix off » en début de film et des grognements et cris de révolte aux moments les plus désespérant de cette course contre la mort imminente…
Perdu en plein océan Indien, le skipper est brusquement réveillé par un choc. Il découvre que son bateau de 12 mètres vient d'être heurté par un container à la dérive. L'impact a éventré la coque de son voilier, créant une voie d'eau importante juste au-dessus de la ligne de flottaison. Loin de se désespérer, le vieux loup de mer, Robert, avec une ingéniosité et une énergie transcendée, répare cette avarie avec les moyens du bord. Comme rien n'est facile, il doit recourir à une solution de navigation d'un autre âge puisque suite au choc dévastateur, sa radio de bord, ses balises de géo-localisation et autres instruments de pilotage électroniques ont été détruits. Il recourt au sextant pour faire sa route...
Il est à peine sorti de cette situation périlleuse, ayant écopé pendant des heures durant, à la force des bras, pour évacuer l'eau ayant inondé sa cabine de vie à bord, qu'une tempête se déclare, et pas des moindres !... Nous voici pris dans la tourmente, monstrueusement chahuté, dans cet esquif que la houle ballote en tous sens, jusqu'à démâter le voilier en perdition.
Robert n'aura cesse de lutter contre ce déchaînement, trempé jusqu'aux os, jeté à la mer, agrippé au bastingage, il ne lâche rien pour franchir les flots ravageurs.
Pourtant, il faudra qu'il abandonne son bateau voué au naufrage puisque le colmatage de la voie d'eau a de nouveau cédé sous les assauts de la mer en furie...
Juste avant que son bateau coule, Robert se réfugie dans un canot pneumatique de survie…
L'aventure ne finit pas là…
Commence alors une lutte pour la vie, plus que jamais âpre, exigeant des forces quasi surhumaines pour ne pas céder ni à la panique ni au désespoir.
Oui, franchement c'est un excellent film, sans artifices, sans la moindre exagération de ce qui demeure possible en de telles circonstances. On oublie qu’il s’agit d’une fiction, le cours des événements tels que subits et appréhendés par l’acteur skipper, vous plonge dans cette rencontre avec soi-même au milieu d'un environnement aussi grandiose qu’hostile. Pendant une heure quarante, vous êtes Lui, à vous battre contre la monstrueuse cascade des catastrophes qui accroissent le degré de détresse comme seule peut en réserver la navigation solitaire en haute mer !...
Robert Redford est tellement dans la situation, qu'il est tout à fait crédible dans son rôle ; ici, la fiction est légale de la réalité… on oublie alors qu’il s’agit d’un acteur et que l’on visionne un film pour se trouver avec un vieux marin expérimenté qui nous entraine dans ses galères océanes, jusqu'à se sentir soi-même, trempé par les déferlements d'eau, jusqu'à sentir les brûlures du sel et du soleil cuisant sur notre peau.
N'auriez vous jamais pris la mer à ce point, ce scénario bien conçu et mené, vous montre que l'homme peut être, lui, pris par la mer autant, pour l'amour qu'il lui voue que par ses dantesques courroux.
Oui, avec Robert Redford, on sombre en toute « confiance » dans le réalisme de cette aventure maritime magnifiquement et adroitement tournée, aux prises de vues à couper le souffle.
Ce film de J.C. Chandor est à ne pas manquer pour découvrir les limites de la nature humaine et la prodigieuse force d'âme qu'on peut faire émerger dans cette rencontre avec soi-même à des moments intenses et cruciaux de sa propre existence. Là, face à l'immensité océane, plus que jamais seul, se dire : "Homme connais-toi toi même, et tout le reste de l'univers ne te sera plus jamais étranger !"...