Bien qu’aillant déjà fait un article sur cette voiture légendaire en amoureux des autos, je ne pouvais passer à côté d’un tel sujet …
Il faut que je vous dise que je suis un abonné fidèle à la revue trimestrielle « Automobilia » , qui, de numéro en numéro, constitue une documentation riche en articles détaillés et magnifiquement illustrés, un incontournable pour tous les passionnés de l’histoire de l’automobile. Dans son numéro 95 paru récemment, la Traction est mise à la Une, bien sûr, et ce sont cabriolets et coupés qui sont mis à l’honneur à travers un reportage où abondent les photographies d’époque… Il faut savoir qu’aujourd’hui, ces remarquables extrapolations de la légendaire Citroën, au côté de la berline, se font extrêmement rares et sont donc très prisées par les collectionneurs.
Ici, à partir d’un souvenir remontant à ma tendre enfance, je me contenterai de vous décrire un modèle d’exception que mon père a eu entre les mains au cours des années 52-53 quand il tenait son garage atelier de réparation à Lesparre en Gironde.
Effectivement, à cette époque, mes parents ont eu une traction qu’ils ont gardée environ une année et demie, avant de la revendre. En soi, à cette époque, cela n’avait rien d’extraordinaire, si ce n’est que la voiture en question était un « faux cabriolet » et qui de surcroît, était carrossée spécialement par un « couturier automobile » d’exception sous le label «Splendilux»
Cette auto, il faut bien le dire, était une petite merveille qui ne passait pas inaperçue :
Sur la base du coupé, la voiture avait été redessinée et ainsi pourvue d’ailes fuselées (bouffantes vers l’avant et s’étirant en un joli galbe, vers l’arrière) ailes, dont la couleur vert jade se détachait sur le reste de la carrosserie traitée, elle, en vert pâle. De profil la belle dans sa livrée deux tons nuancés de vert, avait une superbe allure. Vue de face, à l’avant, une calandre bombée toute chromée à stries horizontales se substituait à la calandre traditionnelle du modèle d’usine. Les phares obus, étaient enchâssés dans un renflement des ailes dotées en leur base inférieure, de part et d’autre de la calandre, de deux bas volets à stries eux aussi chromés, derrière lesquels étaient logés les avertisseurs… A l’arrière la partie comportant le spider, plongeait en une courbe gracieuse, rappelant celle du pavillon, jusqu’au pare-choc entre les deux ailes galbées prolongées chacune par le support de forme très aérodynamique du feu rouge.
Mon père avait fait cette acquisition auprès d’un aviateur de l’armée de l’air qui voulait s’en séparer pour acheter une voiture américaine… Comme à cette époque, mon père faisait aussi la vente de voitures d’occasion, il n’a hélas pas conservé cette magnifique traction coupé et l’a revendue quelques mois plus tard. Dans mon regard d’enfant cette auto avait fait « mouche » vous pensez bien… je ne peux que déplorer qu’on n’ait pas gardée cette voiture à la carrosserie d’exception… En toute honnêteté, je crois bien que s’il m’avait été possible de conserver une seule des nombreuses voitures qu’a possédées mon père, ce serait cette Traction Coupé Splendilux qui, aujourd’hui encore, serait en bonne place, sous notre hangar …
Il faut savoir que Citroën n’a produit des Tractions coupés et cabriolets que du lancement de ce modèle en 1934 jusqu’à la déclaration de guerre. Dans l’après-guerre, la carrière de la Traction se poursuit jusqu’en 1957 mais il n’est plus produit aucun coupé ni cabriolet dans les usines du quai de Javel. Seuls des carrossiers indépendants tels que Marius Renard, Emile Tonneline, Clabot, habillent quelques Tractions à partir du châssis de la berline 11 normale qu’on retrouve également en version découvrable 4 portes. Parmi ces talentueux carrossiers Splendilux sous la houlette d’Esclassan a créé sa propre gamme d’éléments de carrosserie et d’accessoire, préfigurant ainsi la mode du Kit.
A retenir, au niveau de la terminologie :
- Le cabriolet à l’origine ce terme extrapolé de l’univers hippomobile, désigne un véhicule léger. Les voitures à capotes repliables, flanquées de deux portières (une sur chaque flanc), étant allégées prennent l’appellation de cabriolet. Il désigne aussi toutes les versions allégées traitées sport à deux portes et décapotables.
- Le faux cabriolet, n’ayant, lui aussi, que deux portières est apparenté au cabriolet mais à la place de la capote repliable, il possède un pavillon rigide et solidaire du reste de la carrosserie. A partir de 1938 cette terminologie sera abandonnée au profit de « coupé ».
- Le spider est le siège rapporté à l’arrière. Un couvercle basculant sur la malle arrière dégage une ou deux places suivant l’importance de sa découpe. Si elle n’est pourvue de siège, cette trappe sert alors de coffre.
Le plus souvent ces cabriolets et coupés, sans compter le spider, sont des « deux places » pouvant disposer accessoirement de strapontins installés dans l’espace confiné, derrière les sièges. Autant dire que ces places supplémentaires ainsi obtenues sont plutôt exigües, tout juste suffisantes pour y accueillir au maximum deux enfants de moins de 10 ans. Non pourvu de strapontin, ce compartiment peut servir de soute à bagages.
Caractéristiques techniques de la TA "Splendilux" :
- Moteur : 4cylindres en ligne de 1911 cm3 - Alésage / course : 78 x 100 mm - alimentation par carburateur - distribution par soupapes en tête - allumagepar batterie de 12 v et delco.
- Puissance : 46 Ch. à 3500 tr/mn
- Transmission : aux roues avants par différentiel et cardans - boite de vitesses à 3 rapports + MA
- Pneumatiques : 165 X 400
- Empattement : 309 cm - voie avant : 149 cm - Voie arrière : 147 cm
- Dimensions : L : 465 cm - l : 179 cm .
- Poids : 1100 kg.
- Vitesse maximale : 110 Km/h
Je me souviens de quelques voyages effectuées dans ce superbe coupé ; bien sûr, je voyageais derrière mes parents, installé sur le strapontin, la nuque effleurant la lunette arrière … Faisant appel à mes souvenirs, j’ai encore la vision du tachymètre de forme carré disposé sur une platine face au conducteur et gradué jusqu’à 130 Km/h. L’aiguille franchissait rarement le 90… Sans doute parce que mon père ne la poussait pas, maintenant le plus souvent un bon 75 / 80. une allure, somme toute, honorable à l’époque qui devait correspondre à la vitesse de croisière de l’auto et ne générant pas une consommation excessive en carburant car, en la matière, la Ta 11Cv n’était pas un modèle d’économie … Donc pour aller de Lesparre (33) à Charroux (86), prenant le bac entre la Pointe Grave et Royan, il nous fallait bien une demi journée, traversée de l’estuaire de la Gironde compris. Cette auto à la conduite souple permettait de maintenir sans peine une moyenne de 60 / 65 km. La tenue de route d’une traction était irréprochable, son défaut majeur tenait essentiellement au rayon de braquage important et à la dureté de la direction lors des manœuvres de stationnement. A propos de ses performances, je pense que sa carrosserie spéciale l’alourdissait quelque peu par rapport à la berline, l'excedent de poids frisant presque les 200 kilos. Cela devait influencer les performances car le moteur était de puissance identique au modèle standard… La voiture avait bien l’allure sport au niveau du style mais n’atteignait nullement l’allure adéquate au niveau des performances… Cela dit l’auto, dans cette livrée et finition d’exception, attirait moult regards… si la mitre coiffe l’évêque l’habit, lui, ne fait pas forcément le moine…