Réédition d'un article publié initialement le 28/08/2009
En l’an 1020, l’archevêque Gozlin, fils naturel d’Hugues Capet, fait construire une primatiale romane importante qui s’appuyait alors sur la muraille gallo-romaine ceinturant la ville de Bourges. Au cours du XIIème siècle, le chœur et les deux ailes annexes sont construits et vers 1170, il ne reste plus que la façade occidentale à élever …
A savoir qu’en 1137, Louis VII, est sacré roi de France en cette église romane de Bourges.
Avant cette construction commandée par Gozlin, il est fait mention de 3 édifices, bâtis successivement depuis le Vème siècle. Initialement, au cours du IIIème siècle, Saint Ursin évangélisa cette partie centrale des Gaules et devint le premier évêque du Berry. C’est à Saint Etienne qu’il consacre la première église.
Résumons, maintenant, la vie de ce grand apôtre fêté le 26 décembre et qui serait mort en l’an 35 de notre ère.
Saint Étienne est choisi par les « Douze » apôtres comme l’un des 7 diacres pour « servir aux tables » Ce jeune homme à l’esprit ouvert, brillant par sa parole rayonnait sur la communauté par sa sagesse, sa pondération et son enthousiasme à rassembler les foules pour les évangéliser… Ce débordement d’activé dérangeait particulièrement les grands prêtres juifs. Il fut alors convoqué devant le sanhédrin qui l’accusa à tort de blasphémer. Lui, sans chercher à se défendre leur répondait en leur distillant les propos qui découlaient de sa foi chrétienne. Il soutenait par devant ces dignitaires religieux que Jésus était vraiment le messie attendu depuis des lustres, celui que mentionnait les écritures. Dès lors, le Très Haut, devait être connu et adoré par tous les peuples de la terre et pas seulement dans le Temple. Ce discours qui remettait en cause l’ancienne loi Juive et les pratiques qui en découlait, déplut fortement aux membres du Sanhédrin qui courroucé, fit lapider, Saint Etienne. Saül qui faisait partie de ses accusateurs et juges, et qui tint ses vêtement tandis qu’on lapidait Etienne se repentira après la mort du Saint et deviendra l’apôtre Paul …
Revenons maintenant à cette fin du XIIème siècle, en 1195 alors que Philippe Auguste est devenu roi de France. A Bourges, sous l’épiscopat d’Henri de Sully, frère d’Eudes de Sully, évêque de Paris, on décide de construire un nouvel édifice car la primatiale de Gozlin menace de s’effondrer. A cette même époque, l’art gothique, à l’instar de l’imitative de l’influent et fougueux abbé Suger pour la basilique de Saint Denis, commence à parer d’ogives les sanctuaires chrétiens du royaume. Mentionnons alors :
- Abbatiale Saint Denis dont les travaux de rénovation et d’extension débutent en 1035
- Notre Dame de Paris dont le chantier débute en 1160
- Notre Dame de Chartres dont le chantier débute en 1195
- "Saint Etienne" de Bourges dont le chantier débute en 1195
A noter que l’appellation « cathédrale » attribuée à certaines églises tient son origine de « cathedra » ou « cathèdre » qui est le siège où s’assoit l’évêque dans l’église. L’importance de la cathédrale tient donc au fait qu’elle est une église diocésaine plus qu’aux dimensions de l’édifice. Mais bien souvent, se situant au cœur d’une cité populeuse, la cathédrale se trouve être bien plus grande et imposante qu’une église érigée dans un bourg ou dans un village.
En fait le mouvement gothique qui s’impose à partir de la fin du XIIème siècle, déclenche une formidable croisade de reconstruction de ces églises diocésaines. Dans chacune de ces cités, les fidèles s’associant aux chanoines du chapitre, conduit par leur évêque, ont à cœur de faire construire la plus grande, la plus haute et la plus belle des cathédrales du royaume.
On est alors en droit de penser qu’un tel engouement tient autant du chauvinisme que de la piété. Pourtant lorsque l’on contemple tous ces merveilleux édifices parvenus jusqu’à nous, sachant combien cela a représenté d’efforts quasi surhumains au niveau de la réalisation souvent spectaculaire, de temps - ces chantiers pouvaient s’étaler parfois sur trois voire quatre siècles - et de capacité de financement, on est tout bonnement médusé… Et lorsque admiratif, nous en découvrons les divines proportions, les splendeurs sculpturales, les joyaux représentés par ses fastueuses verrières chromatiques, on saisit alors que toutes ces somptueuses œuvres d’art ne peuvent qu’être l’écho matérialisé de la formidable élévation spirituelle ayant saisi ses créateurs concepteurs, réalisateurs et mécènes.
Chronologie. Les grandes étapes de construction de la cathédrale « Saint-Etienne » de Bourges :
- En 1181, Philippe Auguste fait publier un édit favorisant le projet de construire au-delà du mur d’enceinte de la ville. Il en résulte l’édification d’une église basse merveilleuse de proportion, supportant les déambulatoires de l’église supérieure. Effectivement, en deçà de cette muraille de ville, hors les murs, un fossé de 8 mètres de profondeur, devait-être comblé, ceci justifiant la construction de cette église basse (crypte) d’une grande solidité, pour rattraper le niveau du sol de la primatiale bâtie antérieurement…
- En 1195 : commencement des travaux.
- En 1200 : Achèvement de l’église inférieure.
Les murs et les piles de l’élise haute surgissent de la plate-forme constitué par la crypte
Henri de Sully meurt. Son successeur, Guillaume, abbé de Chaalis, homme d’une grande piété et d’une haute culture impose une discipline sévère à ses clercs. Sous sa houlette, il se déploie, à Bourges une grande activité théologique et artistique.
- En 1209 : Mort de Guillaume.
- En 1214 : Achèvement des 4 travées du Chœur et adjonction de 5 chapelles rayonnantes en chevet.
- De 1225 à 1250 : Construction de la Nef (vaisseau central et collatéraux). Edification et décoration de la façade occidentale selon le plan iconographique originel.
- De 1260 à 1280 : Erection des deux tours encadrant les 5 portails de la façade occidentale. Côté Sud de cette façade, la tour « sourde » ne sera jamais totalement achevée. S’enfonçant dans le sol, elle menace de s’effondrer. Pour la sauver de la ruine, elle sera étayée par un pilier butant qui rompt quelque peu l’harmonie de cette remarquable et imposante façade, sans trop nuire à l’esthétique de l’ensemble quand même …
- En 1324, au début de la guerre de Cent ans, après bien des révisions et des consolidations des voutes de la grande nef, a lieu, le 5 Mai de cette année là, la consécration de la cathédrale par le 87ième évêque de bourges : Guillaume de Brosse.
- A la fin du XIVème siècle, le Duc, Jean de Berry, fait exécuter par son maître d’œuvre, l’architecte Guy de Dammartin, la construction du grand fenestrage qui pare majestueusement la façade principale : le Grand Housteau.
- Le 31 Décembre 1506 , se produit l’effondrement de la tour Nord …
- De 1508 à 1524 : Réédification de cette tour Nord grâce aux subsides du Roi Louis XII et à la générosité des fidèles
- Au cours des XIVème, XVème et XVIème siècles sont exécutées les adjonctions de chapelles dans les travées droites du chevet de la nef.
- Du XIIIème au XVIIème siècle : Garnissage de toutes les baies en vitraux.
- Au XVIIIème siècle comme dans la plupart des grands édifices du royaume, les chanoines du chapitre vandalisent bon nombre de ces chefs d’œuvres en remplaçant les vitraux d’origine par des verrières blanches afin d’obtenir plus de clarté à l’intérieur… A Bourges, ils détruisent aussi le jubé. Il faut considérer comme miraculeux qu’ils n’aient pas touché aux vitraux du Chœur, parvenus jusqu’à nous …
- De 1830 à 1890 : restaurations diverses dans la maçonnerie extérieure conduite par Viollet-Le-Duc. Ces retouches n’entraînent pas trop de dommages au niveau de l’harmonie d’ensemble. Sont dénoncées par certains puristes, les reconstitutions jugées excessives des sculptures de la grande façade.