Images ci-dessous, à gauche et plus bas , à droite : Dessins d'illustration pour "La route de nuit" fantaisie fiction enregistrée sur bande de magnétophone ... Ces dessins on été réalisés en 1965 par l'auteur de ces lignes qui, hélas, ne possède aucune photo de sa première voiture...
J’ai obtenu mon permis de conduire en novembre 1964 et quelques jours plus tard, avec mon père nous faisions le tour des garages dans Poitiers et ses environs afin d’acheter d’occasion, l’auto indispensable pour aller prospecter tout comme le paternel, auprès d’éleveurs, en campagne, y effectuant la vente de produits et accessoires pour la santé et l’entretien du bétail… Le modèle idéal envisagé était la 2CV Citroën voiture tout à fait adaptée au mode rurale, étant à l’aise pour rouler jusque dans les petits chemins encaissés du bocage en Gâtine.
Il s’avérait vite que ce type de véhicule pourtant populaire était difficile à trouver si l’on n'y mettait le prix, à moins de se rabattre sur une vieille 2CV au kilométrage important. En fin de matinée nous avions repéré une belle AZL couleur café au lait de 1963 estimé à 3800F. Ca faisait cher mais la belle n’avait que 20 000 Km et était de présentation impeccable. Le hic, c’est qu’au moment de l’essayer, il y avait un problème avec l’embrayage centrifuge et la première qui passait mal … Pas assez fiable mon fils ! constata mon père… allons voir plus loin et en attendant allons déjeuner !... Une bonne entrecôte frites tempéra, à point, mon impatience… Au cours de l’après-midi notre quête demeurait infructueuse, entre tacot et modèle quasi neuf difficile de trouver une 2CV convenable à prix raisonnable… Il fallait se rabattre sur un autre type d’auto. C’est à la SAGAMP de Poitiers, boulevard du Grand Cerf que se présenta l’affaire à faire sous l’aspect d’une très distinguée Panhard en livrée noire modèle Dyna Z de 1957 cotant 1500F et ne totalisant que 75000 kms au compteur. Après un essai convainquant l’affaire fut conclue et c’est non sans émotion et ravissement que je pris le volant de celle qui devint alors ma première voiture… L’intérieur en skaï beige et rouge conférait à cette Dyna un aspect à la fois jeune et sportif, quant aux performances elles se situaient bien au-delà de celles accréditées à une poussive 2CV... A l’époque, point de jeune permis ni limitations de vitesse hormis celles, ponctuelles, indiquées par panneaux dans les zones de parcours dangereuses et les traversées d’agglomérations ; la différence, c’est qu’au milieu des années « soixante » circulaient sur les routes de l’hexagone, 1000 fois moins de voitures qu’aujourd’hui !... Tout cela n’empêchait pas d’être prudent en tant que nouveau conducteur encore inexpérimenté… C’est donc avec cette Dyna que je me familiarisais avec la conduite auto et découvrais sur le mode jubilatoire, le monde de la route et des voyages au long cours, le tout, ponctué de péripéties parfois rocambolesques mais aussi de déconvenues …
Dans la pratique professionnelle l’auto était moins adaptée pour rouler dans les chemins creux et cours de ferme boueuses que ne l’aurait été une vénérable 2CV mais question standing et pour les promenades du dimanche, la Panhard présentait mieux, c’était indéniable … Je ne tardais pas à équiper ma « Panpan » d’un autoradio, et lors des sorties du samedi soir, à l’identique de Jean-Claude Annoux, jouer « les jeunes loups » pour tenter de séduire les « Poupées de cire… » au son du pétaradant bicylindre de ma Diva, heu pardon de ma Dyna. On était en 1965, Alain Barrière chantait « Ma Vie », j’étais aussi bien dans la mienne avec mes 21 ans tout frais, le service militaire effectué et homme jeune au volant sur la grille de départ de l’existence parmi les adultes …
Anecdotes en « Panpan » immatriculée : 956 DM 86
- Un dimanche après-midi, Gérard, Robert, Bernard B et moi au volant, jeunots entre 18 et 20 ans nous voici, dans le bourg de Ceaux à faire les sots demandant à l’arrêt au milieu d’un carrefour à une brave dame transportant sa jupaille sur un cintre, la route de Chinon, écouter ses explications et lui répondre « Merci M’Dame du coup on va aller à Richelieu… » On faisait les intelligents quoi ! A Richelieu on faisait les « marloux » à tourner autour des places carrées en faisant crisser les pneus… Garant l’auto dans un nuage de poussière, nous en sortions en claquant les quatre portières en même temps, histoire d’impressionner quelques « nanas » assises à une terrasse en face… De vrais petits minets à claquer j’vous jure !... Enfin à cet age, on se croit tellement intéressant…
- Un autre Dimanche avec un autre Bernard A, cette fois, on rôde au pas, le coude à la portière sur l’avenue de Blossac à Châtellerault…. Pas une fille nous remarque … Soit, on pousse plus loin… A la sortie de la ville, deux jeunettes font du stop . Tu parles, on les prend ! Elles vont à Poitiers, route de Bordeaux… A votre service mesdemoiselles ! Les 33 Kms de N10 qui séparent les deux villes sont effectués en un quart d’heure !... (Impossible de réaliser une telle moyenne aujourd’hui sur l'infrastructure bien plus moderne, à 4 voies avec lbon nombre de ronds points et de limitations à « 70 » …) Nous déposons, à leur demande, les deux jeunes filles quelque peu livides, devant une guinguette, route de Bordeaux… Elles nous remercient et nous précisent qu’elles vont retrouver là, leurs copains … By by mes jolies !... Avec Bernard on se regarde contrits… « J’aurai dû rouler moins vite hein ? Et on aurait eu le temps de faire connaissance pas vrai gros ballot que je suis ! dis-je à mon copain … - Tu l’as dit bouffi !... »
- Ce mardi là c’est Gilbert qui m’aperçoit Porte de Mirebeau à Loudun. Je m’arrête à son niveau et il monte à bord, on va se prendre un pot au prochain troquet et nous raconter nos souvenirs de « bahut »… Seulement il n’a pas bien loqueté la portière et à l’accélération, celle-ci s’ouvrant dans le mauvais sens, (gond sur le pied montant central) elle se rabat vivement et martèle le montant entre portières côté droit …
- Un jour d’ Avril 65, je roule à « 110 » sur cette portion rectiligne de la route Loudun Chinon, 300 mètres avant le passage à niveau dans un « S » aux environs de Beuxes… quand soudain « crac !...» la direction tire brusquement à gauche où, en sens inverse, vient à ma rencontre, une 2CV … Il faut éviter le choc frontal, je tire sur le volant pour ramener la Panhard folle sur la voie de droite… Ca ne répond pas … A force d’insister je parviens à ramener ma voiture du bon côté mais trop... on se prend le talus… heureusement il est au niveau de la chaussée, le bas-côté est, à cet endroit, sablonneux, quelque peu déformé et il y a de grandes flaques d’eau résultant des pluies printanières... gerbes d’eau, éclaboussures jaunâtre sur le pare-brise, soubresauts du véhicule qui me chahute sur mon siège ( pas de ceinture à l’époque …) avant qu’au bout d’un temps qui me semble interminable, la voiture ainsi freinée, ne s’immobilise. A un moment, j’ai bien senti le souffle de la 2CV croisée qui n’est sans doute pas passée loin ; le pire a été évité !…Un laps de seconde s’écoule avant que je reprenne mes esprits, je me tâte ça et là... pas de bobo… mon cœur bat la chamade … je sors de la voiture…. Elle est maculée de boue, fumante sous le capot et manque la roue avant gauche… « Hé bien, vous nous avez fait grande frayeur ! » Je me retourne deux femmes se dirigent vers moi, les occupantes de la 2CV arrêtée plus loin derrière… Je les regarde éberlué « D’abord votre roue perdue qui est montée au moins une vingtaine de mètres en l’air puis, votre voiture fonçant sur nous, on a bien cru que c’était la fin… - Ah oui !... ??? j’ai perdu une roue à l’avant… (comme si c’était normal…) oui oui… sûr, on a eu chaud !… Vous n’avez rien, mon Dieu !... Où elle est maintenant cette fichue roue ?... Nous remontons la route sur au moins 200 mètres avant de découvrir ladite roue dans un champ en contrebas du côté où circulait la 2CV… Par contre, les 3 écrous de serrage, eux, sont introuvables pas plus que l’enjoliveur pourtant non solidaire puisque fixé sur le moyeu, les jantes étant du type "flasque de roue" comme sur les 4CV … Ayant surmonté l’émotion et le contrecoup, ces gentilles dames me conduisent à l’habitation la plus proche d’où je puis téléphoner à mon garagiste à Mirebeau lui expliquant mes avatars… Celui-ci arrive une quarante de minutes plus tard… En fait j’avais sorti la Panhard de son garage le matin même suite à un changement des garnitures de freins … Son apprenti qui avait effectué la réparation avait certainement oublié, en remontant les roues, de parfaire le serrage de l’une d’elle … Tu parles Charles !... Ce soir là j’ai mis longtemps pour rentrer à la maison …
- Il y a aussi cette escapade à Paris un soir pendant les vacances de Pâques depuis Mézières en Brenne (Indre) entre monos pour aller en boîte ( A 300 Kms, c’est à côté hein ! …) En boîte ... justement...
- Au retour de ces vacances de Pâques , à la Roche-Pozay la boîte à vitesse fait des siennes, Je rentre en 3ième à Mirebeau ne pouvant rétrograder en 2nde pas plus qu’en 1ière et pas question d’enclencher la 4ième qui, elle, ne passe plus. Je joue sur l’embrayage et fais particulièrement fumer celui-ci dans la traversée de Châtellerault… Au garage « W » le patron me confirme méga casse de boîte… En changer ? le coût dépasse celui de la voiture … C’est ainsi que trois jours plus tard je me retrouve en « Deudeuche » …