Maintenant que nous en avons fait le tour, que pouvons nous encore retirer de ce cycle méditatif ?...
Il faut préciser que nous n’avons fait que survoler chaque thème qui aurait pu être bien plus approfondi … mais le but était aussi que chacun complète avec ses propres réflexions …
Pour conclure, nous allons envisager cette évolution cyclique en opposant les thèmes abordés, non plus dans leur succession, mais dans les rapports qu’ils ont lorsqu’on les considère de façon symétrique autour de l’axe bipolaire Naître / Penser
- Naître / Penser : Naître, donc parvenir à la Vie, s’oppose à Penser qui prend des forces de Vie… Nous référant aux généralités abordées pour chacun de ces thèmes de réflexion, nous constatons effectivement que nous tenons là une polarité remarquable où l’on en déduit que les forces de vies (Vitalité) s’opposent aux forces du Penser, sclérosantes… (Dans le langage courrant, on emploie souvent cette expression : être « rongé » par ses pensées) Il suffit de se mettre à penser intensément pour observer que le mouvement intérieur se créant, annihile tous mouvements extérieurs, on se «rigidifie » en pensant intensément… On pourrait dire cela d’une autre manière en soulignant que, les forces de vie à l’oeuvre dans la croissance, ajoutent sans cesse de la matière corporelle, tandis que, les forces du Penser, détruisent, brûlent régulièrement cette matière corporelle … Une autre comparaison saisissante est à observer dans la lutte que l’organisme effectue pour surmonter une maladie entraînant la fièvre, grosse productrice de calories et, le refroidissement consécutif à une intensification de l’activité intellectuelle. C’est donc bien sous l’aspect de cette polarité que l’on doit envisager cet axe Naître / Penser. Ce qui vient du haut et qui va vers le bas, est en opposition à ce qui, venant du bas, se dirige vers les hauteurs …
Maintenant, qu’avons-nous, de part et d’autre de cet axe … Partant du haut :
Naître
Rassembler Marcher
Servir Jouer
Partager Parler
Apprendre Admirer
Penser
- Nourrir / Travailler … Le rapport entre ces deux concepts est lui aussi remarquable, quasi polaire… Se nourrir, emmagasiner de l’énergie et, travailler, dépenser cette énergie… D’un côté, en mangeant, je reçois, de l’autre, en m’activant, je donne… Un juste équilibre s’opère à travers ces processus vitaux se métamorphosant en forces et en énergie … Ce sont les forces, et non la matière végétale ou animale contenues dans les aliments, que je transforme en digérant, et que j’utilise ensuite comme énergie vitale lorsque j’accomplis une activité d’ordre physique ou cérébrale … La rançon du travail, au-delà de la production qui en découle, est pour celui qui le produit, de permettre d’en vivre et donc de pouvoir se nourrir, un équitable retour des choses… Je me nourris pour travailler et je travaille pour me nourrir, la réciprocité paraîtra simpliste mais mérite d’être mentionné, ne serait-ce que pour souligner l’importance du "comment travailler" et du "comment se nourrir" … On remarquera encore la similitude existante entre ces deux activités complémentaires, par le fait que l’organisme effectue un travail considérable à travers les fonctions digestives, au même titre qu’il produit une activité musculaire exercée au cours d’un travail physique. En ce qui concerne l’activité cérébrale liée au travail il y a également une mise en mouvement mais cette fois au niveau des capacités cognitives. En fait la similitude est encore plus évidente quand on prend conscience que l’appareil digestif, en interne, métamorphose nos aliments en énergie et, qu’extérieurement, notre travail métamorphose graduellement le monde avec tous ses composants inanimés et vivants, autour de nous …
- Marcher / Rassembler … Deux actions complémentaires qui, par leur nature, seraient polaires du fait, qu’en marchant, on s’écarte de son point de départ vers un point de la périphérie et qu'en rassemblant, c’est à la périphérie que l’on va chercher ceux ou celles que l’on veut ramener dans un même centre, d’accueil ou d’intérêt … Dans les deux activités, il y a mouvement et même, mouvement intentionnel, avec, le plus souvent un but à atteindre isolément ou en groupe. Sous l’aspect complémentaire, on peu alors dire : je marche pour aller au devant des autres et, les ayant rassemblés, je les fais revenir ensemble avec moi. L’idée de progression se retrouve dans les deux verbes, pour marcher, cela tombe sous le sens, et, pour rassembler, c’est bien parce que ce groupe envisage d’avancer ensemble, dans la réalisation de projets communs ou dans la conduite d’une quelconque entreprise … Et le but, c’est bien qu’avec tous ceux qui sont rassemblés, ces entreprises, à leur tour, marchent et progressent … là, encore, dans ces deux cas, les menées se font pas à pas … Personnellement, je suis toujours profondément ému lorsque sur la scène d’un théâtre, en fin de représentation, je vois avancer du fond de la scène, toute la troupe des acteurs se tenant par la main pour venir saluer le public à leur pieds. Les larmes me viennent au yeux… je trouve cela grandiose et beau : Faire en commun, faire ensemble, avec des individualités disparates, quelque chose, destiné aux autres : Faire ensemble le chemin … accomplir un bout de route ensemble … Les exemples sont multiples : marcher main dans la main avec la compagne ou le compagnon avec laquelle ou lequel on a voulu unir sa vie … Il me souvient encore, que dans notre travail d’éducateur nous accompagnions nos résidents, nos « villageois » dans la conduite de leur existence dans la menée d’actes quotidiens … Aller au devant pour faire ensemble le chemin …
- Jouer / Servir ... avec ses deux verbes, nous retrouvons la polarité et la complémentarité. Polarité du fait qu'en jouant, c’est mon plaisir que je satisfais (Jouer sans plaisir est pour moi inconcevable…) et servant, c’est bien pour le plaisir de qui je sers… A remarquer que l’on peut prendre du plaisir dans les deux situations, en jouant et en servant. L’acte de servir se retrouve souvent dans les jeux, dès que nous avons un partenaire de jeu ; entendez - partenaire - dans le sens le plus large, c'est-à-dire : celui qui partage le jeu avec moi ; il peut aussi bien être mon équipier que mon adversaire en cours de jeu… Ainsi, je sers en distribuant les cartes au cours d’une partie de tarot, par exemple, ou bien, quand revient mon tour du service, lors d’un set au tennis… Cette notion de servir, est donc fort usitée en cours de jeu, lui conférant son aspect social. A noter que, même dans les jeux enfantins, servir est un acte que l’enfant plagie à merveille, imitant ses parents ; même seul, il joue à « rendre service » car jusque dans son imaginaire, il y a des présences auxquelles il destine ses « services » et dont il attend, qu’en retour, on les lui rende également… Encore une chose, dans tous jeux organisés et «construits», on se sert aussi des règles pour bien mener le jeu… Maintenant, la notion de jeu se retrouve-t-elle dans le «servir» ? Certainement ! Déjà, dans le cérémoniel qui participe au service, au niveau de la procédure, du rituel, du répétitif, donc du rythme et de l’esthétisme que l’on met dans son service. Il y a, l’art et la manière dans le service à accomplir, et comme dans le jeu, il y a, aussi, des règles à observer. Et puis, très curieusement, dans les «jeux de l’amour», on se trouve souvent être «chevalier servant», au service de sa Belle, par conséquent !… Jouer, servir, vont donc parfaitement ensemble …
- Parler / Partager … La parole est faite pour être donnée, autant que pour être reçue, ainsi est-elle, aussi, partagée … Nous sommes dans l’échange, de mots, de propos, d’idées. Communiquer et, pour cela, parler en partageant le temps de parole. Par la bouche, je m’exprime mais le monde aussi, s’exprime en moi et, parlant, je dois encore partager entre ce qui me concerne et tout ce qui ne me concerne pas, à propos de sujets auxquels je m’intéresse et dont j’ai à communiquer les points de vue. Ainsi, sont-ils partagés par d’autres… Dans toutes réunions ou assemblées de personnes la parole est partagée; même un discours, long monologue, s’ensuit d’interventions sous formes de commentaires ou de questions venant de l’auditoire. La parole fait nécessairement échos, déjà parce que les sons dont elle est porteuse, ricochent sur les obstacles naturels, puis rentrent dans toutes les ouvertures de l’écoute à l’entour… à une bouche pour parler et dire, correspond une oreille pour entendre et recevoir la parole. Quand, alors, l’entendement s’en saisit, le récepteur, à son tour, répond au propos. Ainsi converse-t-on, ainsi s’établit le dialogue et, de là, naissent les discussions, extraordinaire suite d’échanges d’opinions et d’idées. La parole partagée, le partage des idées exprimées, deviennent alors créatifs … De façon réciproque, pour partager, on a besoin de la parole, ne serait-ce que pour mentionner, lister le contenu pour, ensuite, établir l’ordre du partage dans un souci d’équité. Il en va de même dans le partage de son temps, de ses émotions, cela s’exprime aussi par la parole laquelle, fait alors, plus que légitimer le partage mais lui confère, à ce moment, une plénitude faite de spontanéité et d’harmonies, et lui procure l’élan propre à la générosité …
- Admirer / Apprendre … et, justement nous en sommes maintenant arrivés là, pour tomber à point avec cette nouvelle paire associative … Apprendre et admirer, ont en commun l’esprit d’ouverture, la réceptivité, la disponibilité intérieure, la confiance… Si, lorsque j’admire, je suis en quelque sorte passif, me laissant imprégner par l’objet de mon admiration, par contre, pour apprendre, il me faut être actif, comme tendu vers le sujet de l’apprentissage… mais dans les deux cas, mon intérêt pour l’objet ou le sujet est manifeste. Il est évident que si devant un panorama grandiose ou un magnifique tableau vu dans un musée, je ne manifeste pas d’intérêt, rien ne viendra forcer mon admiration ; de même, assistant à un cours quelconque, si je ne suis attentif à rien de ce qui se dit ou se passe, rien ne sera retenu de ce que je suis censé apprendre… Cela vous semble des évidences mais qu’il est bon de circonscrire et de souligner ici, pour établir le rapport entre, admirer et apprendre … En fait, pour apprendre, il est bon de recourir aux sentiments proches de l’admiration. Si au cours d’un apprentissage je ne suis pas en quelque sorte étonné, puis émerveillé de ce que je découvre, encore tout nouveau pour moi, le mobile, pour bien apprendre, fait énormément défaut… Vous savez, quand vous chercher quelque chose et que vous le trouvez soudain, le «Euréka, j’ai pigé !» est véritablement un cri de joie et d’admiration… Et puis, quand on parvient à réussir un exercice imposé par son apprentissage, n’est-on pas émerveillé par ce que l’on a obtenu de soi ?… Cette satisfaction passagère est, elle aussi, indispensable. Enfin, admiration et apprentissage sont indissociables car, pour apprendre quoi que ce soit de quelqu’un, il faut nécessairement que cette personne suscite votre admiration, qu’elle vous étonne par son savoir, ses capacités… ça aide et ça vous met en confiance pour bien apprendre … Admirer ses Maîtres en toute objectivité, est la première clef ouvrant les portes du savoir et certainement la plus indispensable parce que, si effectivement, ce sont de bons maîtres, pour apprendre, ils vous communiquent leur enthousiasme … Et là alors c’est le Nirvana !… C’est bien la raison qui fait dire que, dans ce cas où il est surtout question d’apprendre, il est indispensable de rester un "enfant toute sa vie," un enfant qui s’émerveille et s’étonne à chaque fois qu’il découvre quelque chose de nouveau ou qui, plus simplement encore, se présente sous un jour nouveau …
Alors voilà, nous avons mis en parallèle les verbes de cette méditation post Noël. Pour finir cet exposé, je les regrouperai maintenant tous sous une thématique intitulée : Amour et liberté … Pourquoi ?...
L’axe centrale d’une vie : Naître – Penser … me fait dire qu’on ne peut Naître que de l’Amour, et aux gentils contradicteurs qui me diront qu’il se trouve encore assez souvent qu’une naissance ne soit pas vraiment le fruit de l’amour , je répondrai tout simplement à ceux-là, que l’on « naît » plusieurs fois au cours de son existence et qu’il suffit de "s’aimer" un tant soit peu … Le phénix ne renaît-il pas de ses cendres ?… Liberté dans le « penser », je crois que là, vous serez d’accord … Effectivement chacun peut faire ce constat : « je suis bien seul et donc libre pour aborder les pensées qui m’assaillent mais aussi pour en développer d’autres, à partir de ma propre réflexion et les conduire comme il me convient voire, librement, comme il convient…
Dans tous les autres axiomes abordés Amour et Liberté sont également présents … nourrir/ travailler – marcher / rassembler – jouer / servir – parler / partager – admirer / apprendre …
Je vous laisse le soin de faire vous-mêmes, les rapprochements de chaque éléments de ces "paires" avec ce double thème Amour & Liberté …Ce cycle de Vie, parcouru au cours des 12 Nuits Saintes, nous a permis d’établir cette «libre ronde de l’amour»… eh bien maintenant, vous pouvez entrer dans la danse… celle des jours à venir, de cette année juste entamée !