Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Le Mirebalais Indépendant

La Vie d'ici et d'ailleurs - Patrimoine : d'hier à aujourd'hui, un monde riche de son passé, a forcément un Avenir ...

Publié le par FARFADET 86
Publié dans : #Les clins d'oeil du Farfadet
Lectures croisées...

« Lectures en alternance » serait sans doute plus approprié du fait qu'il s'agit de la lecture de deux œuvres différentes lues, l'une un soir, l'autre, le soir suivant, et ainsi de suite... mais j'ai préféré ainsi titrer cet article car ces lectures se croisent effectivement, me trouvant, moi, le lecteur, à la jonction...

Oh, cela n'a rien d'extraordinaire, je n'invente rien sur cette façon de lire deux romans à la fois et je me doute que d'autres font certainement plus avec encore plus d'ouvrages… Ce n'est non plus un quelconque défi, c'est tout simplement faire se rencontrer des personnages d'époques très distantes l'une de l’autre, dans ma conscience et mon imagination de lecteur. Ce qui est sûr, c'est que j'ai été très assidu dans cette manière de procéder et que j'étais passionné par ces intrigues différentes mais aussi par une galerie de personnages de premier, mais aussi de second plan, qui ont marqué l'Histoire, voire la Légende...

Il s'agit de « Jeanne d'Arc » de Edward Lucie-Smith et de « Les portes de Gergovie » de Michel Peyramaure. Deux œuvres associant la fiction à réalité historique de deux événements marquant de notre Histoire, moments distant de presque 1500 ans dans le temps. Le premier salvateur, le second fondateur de notre nation au cœur des tourmentes guerrières.

Des conquêtes de César proconsul romain en Gaule celte, au premier siècle avant Jésus Christ, aux batailles que livra la Pucelle pour bouter les Anglais hors de France au premier tiers du XVe siècle.

Le nombre de pages des deux livres étant sensiblement différent, j'ai en toute logique, terminé la lecture du premier cité, avant le second...

Dans l'un et l'autre, la chronologie historique est respectée, seul le contexte d'époque diffère et, avec, les mentalités des personnages, les degrés de culture et de civilisation ; par contre, ce qui les distancie c'est leur datation en rapport avec l’avènement du christianisme : avant – après …

Le premier met en évidence le personnage de Jeanne d'Arc auréolé par sa céleste mission qu'on voudrait dégager de sa gangue mystérieuse pour la rendre plus conforme à la vérité historique (L'auteur est Anglais...)

Le second, met en filigrane le personnage de César intraitable conquérant pour mettre en avant un héros imaginaire : Kouros jeune Grec recueilli par les Arvernes de Gergovie.

Dans « Jeanne d'Arc » le personnage historique rayonne par l'impact de la légende sur le fait historique ;

Dans « les portes de Gergovie » Kouros, personnage imaginaire, devient le faire-valoir de cette autre réalité historique...

C'est bien cette polarité qui est haletante !...

 

Le livre : « Jeanne d'Arc » d'Edward Lucie-Smith...

Les ouvrages consacrés à notre « héroïne Nationale » sont légions... ( Tiens ! Légion encore un clin d’œil à la Rome conquérante de César de ces lectures en parallèles...) Ce sont effectivement des dizaines de milliers de livres qui, en 590 ans, se sont inspirés de l'épopée de la Pucelle qui délivra de ses assiégeants la bonne ville d'Orléans...

Celui dont je viens de terminer la lecture a été écrit par un Anglais ce qui le singularise car, justement, le ton n'est pas revanchard ni irrespectueux du personnage de Jeanne et de sa mission. L'auteur tente de comprendre comment cette jeune fille audacieuse, d'à peine 18 ans, a pu s'engager dans un périple militaire qui la conduisit de la Lorraine à la Touraine pour y lever une armée qui harcèlera les occupants anglais sur la terre de France et fera couronner le petit roi de Bourges...

Tous, connaissons cette histoire merveilleuse, ces prodiges guerriers qui s'achèveront par l'inconcevable procès et la livraison aux flammes du bûcher à Rouen de cette jeune fille aventureuse soumise à ses voix du ciel, animée par son ardente croyance en Dieu.

Ce roman à la fois historique et biographique, tente de coller le plus possible à l'Histoire en s'appuyant sur un grand nombre de documents dont l'essentiel est constitué par les minutes du procès contenant un interrogatoire exhaustif sur le parcours de la Pucelle depuis l'enfance jusqu'à sa capture à Compiègne.

Tout ce qui apparaît comme irrationnel, magique en quelque sorte, n'est pas évincé du récit chronologique reprenant le moindre fait et même certains échanges de paroles entre les protagonistes de cette histoire peu commune ; que ce soit à la cour de Charles VII, lors des veillées d'armes ou sur les champs de batailles. On y retrouve les états d'âmes de la jeune fille correspondant à sa maturité précoce mais aussi à sa fragilité de femme émotive.

La part de mystère et d'événements extraordinaires comme les conversations avec « ses voix » est laissée comme telle. Le merveilleux n'est ni transfiguré ni éradiqué, ce qui importe à l'auteur c'est la cohérence des agissements et des décisions prises en fonction de la « mission »

Jeanne ne faillit pas et va jusqu’au bout de ses engagements, le désespoir ne la saisit pour ainsi dire jamais. Les doutes, elle les manifestera lors des dernières journées de son procès mais elle se ressaisira jusqu'à accepter la mort terrible par le feu.

Cette pugnacité en toutes épreuves, ce acharnement à chasser l'occupant et récupérer les villes qu'ils ont soumis se retrouve encore au début du chapitre 22, à travers ces lignes page 176 :

«  Jeanne était toujours impatiente d’attaquer Paris bien que l'enthousiasme générale pour cette entreprise eût fort diminué. Elle se contint pendant les négociations, puis, comme cela lui arrivait si souvent, ne peut supporter d'attendre d'avantage. Elle dit à Alençon :

« Mon beau duc, faites appareiller vos gens et ceux des autres capitaines. Je tiens à voir Paris de plus près que je ne l'ai vu. »

Tous deux se séparèrent du Roi, gagnèrent Senlis qui s'était rendu après la retraite de Bedford et, ayant rassemblé de nouvelles troupes, avancèrent jusqu'à Saint-Denis. »

Rien de ce que l'Histoire a recensé, retenu et publié n'est omis ici, ce parcours de vie hors norme de Jeanne, si court mais si dense en événements grandioses, est conté dans le détail. Ce récit bien construit n'enlève rien au merveilleux. La légende met en lumière les faits historiques, et, réciproquement, ceux-ci magnifient la légende. En dépit de ces visions, Jeanne, tout au long de son histoire, nous livre d'elle une image absolument humaine dont, seule la force d’âme, reste prodigieuse. L'auteur Edward Lucie-Smith, l'a parfaitement ressenti et admirablement traduit dans son livre.

 

Le livre : «  Portes de Gergovie » de Michel Peyramaure.

Environ 1500 ans plus tôt, le sol pas encore français, est aussi soumis à l'envahisseur. Ce vaste territoire constitué d'un maillage complexe de petits royaumes manque d'identité unitaire ; ceci profite au conquérant romain qui, au gré de ses avancées, établit des alliances avec certains chefs de tribu opportunistes tout en faisant la guerre à d'autres bien plus belliqueux et surtout soucieux de garder leur indépendance et liberté de circuler dans cette Gaule que César veut soumettre.

Michel Peyramaure nous introduit avec justesse et brio dans cette époque lointaine, nous faisant vivre, grâce à l'intensité du récit, cet épisode historique fort qui scellera le destin de notre nation.

Nous entrons alternativement dans l'écriture, livre après livre, de la conquête des Gaules de César que son aide de camp et scribe Hirtius l'aide et conseille à rédiger, et dans la cité Arverne de Gergovie où Kouros le Grec, capturé par les hommes du roi Gobanito, sera «  esclave  libre » en la cité. Hébergé chez le druide Uritaco, Kouros jouira de l'estime réciproque que se vouent ces deux hommes puis s'attachera de plus en plus au mode de vie de ces gaulois qui ont pactisé avec César mais vivent toujours à leur manière celte, découvrant les rites parfois barbares de leur religion mais aussi toutes les techniques et pratiques avancées pour l'époque, en agriculture et en artisanat.

C'est une plongée saisissante dans trois courants de culture très différente mais aussi complémentaire que Michel Peyramaure nous fait exécuter : Grec – Latine – Celte. Lyrisme épique, Puissance militaire, Autarcie tribale, se rencontrent et se confrontent parfois jusqu'à la mort, jusqu'à l'extinction.

Ces personnages regroupant ceux que l'Histoire a retenu et ceux habilement créés par l'auteur, se retrouvent dans la tourmente de ces temps de conquête, de batailles et de longs sièges, mais aussi les passions qui les animent et les font grandir jusque dans la légende. De Vercingétorix et César, héros antagonistes de cette épopée, nous partageons les affects, les aspirations, les stratégies combatives mais aussi leurs tourments et leur doutes. Kouros, épicurien, aède philosophe, témoin bien présent dans cette confrontation haletante, d'abord loin des vicissitudes et menées guerrières sera, lui aussi, entraîné dans la furie des combats. Son inspiration et son sens de la stratégie en fera un héros malgré lui. Les femmes, dans leur environnement se manifestent comme de belles et pugnaces égéries, tantôt amazones fulgurantes, tantôt mères dévouées à leurs progénitures...

De Gergovie la victorieuse à l’oppidum d'Alésia la vaincue, la tragédie prend de l'ampleur et l'occupant grandit en maître aussi intraitable qu'incontestable de ces territoires arrachés à leurs volontés d'indépendance. Libre, redeviendra la Gaule romaine qui, dans l'épilogue, a rassemblé Hirtius et Kouros… nous les retrouvons page 400, dernière de ce récit :

« Ces gens – elle (Samara compagne de Vercingétorix) et Kouros – sont fermés sur leurs secrets ; le monde où ils vivent est en dehors du monde, sous les épaisseurs de nuit et de glace ; ils ont la fierté des vaincus qui repoussent les grâces du vainqueur. Leur victoire, c'est cette intransigeance, ce refus, ce secret.

  • Je dois partir, dit Hirtius . Puis-je dire à César que je t'ai rencontré ?

  • César ? Dit-il. Se souvient-il seulement de moi ? »

 

Ainsi, au cours de ces soirées de décembre, ai-je vibré avec ces personnages historiques et fictifs, vivant avec eux ce qui n'est pas le commun des mortels, un chemin tantôt mené comme une ascension grandiose, tantôt suivi âprement comme une descente aux abîmes. Chacun a assumé ses choix, chacun a exorcisé ses doutes, chacun a sublimé ses peurs, chacun a suivi ses convictions, confiant en son étoile, en ses voix...

Ils sont un peu nous et, avec eux, nous sommes un peu de cette France qu'ils ont faite de longue date et qui nous a faits, et, qu’immanquablement, nous aimons.

Commenter cet article
M
Je lis souvent plusieurs romans à la fois moi-aussi, un plus facile pour le soir quand mon mari regarde la TV et que je veux rester auprès de lui alors que l'émission ne m'intéresse pas et un autre plus littéraire que je préfère prendre de cette saison en fin d'après-midi devant un bon thé en rentrant de balade ou le matin tôt puisque je suis la première levée...Je lis peu de romans historiques cependant à part ceux concernant le XXe siècle, mais j'y viendrai un jour j'en suis certaine ! Merci pour cette lecture croisée...Belle journée à toi
Répondre
F
Bonjour Manou, <br /> oui, c'est bien de s'aménager des temps de lectures et d'effectuer des chois en fonction de sa disponibilité d'esprit. Un temps pour se divertir, un temps pour réfléchir ainsi nous construisons-nous au fil des pages qui se tournent le matin, à la mi-journée et le soir ... <br /> Amitiés des Farfadets du Poitou.
É
Salut le Farfadet du Poitou ! Tu as raison de lire. Si les gens lisaient pluss, ils parleraient moins de la pluie et du beau temps (hé hé hé) ou de leurs maladies. J'aime bien les gens qui s'intéressent à l'Histoire. Je crains que dans un futur proche les gens aient la mémoire courte ; sur notre passé, nos origines, les grands faits de société... A ce propos, il ne faut pas rater ce soir l'excellent film "La loi du marché" avec Vincent Lindon, qui pourra éclairer le peuple français de part sa juste vision des choses.<br /> Grosses bises à Annie et à toi !
Répondre
F
Bonjour Eliane et merci de ta visite sur ces pages.<br /> La lecture propice à l'évasion, est une aide formidable pour digérer les annonces du jour qui contrarient et fâchent. , Avec le temps, nourrissant notre esprit, élargissant le champ de notre vocabulaire, nous ouvrant à d'autres idées et points de vue, elle permet de mieux apprécier la teneur des événements et d'avoir un jugement plus nuancé sur eux... se constituer une juste ouverture d'esprit. <br /> Bises des farfadets du Poitou.
M
J'ai noté les titres et les auteurs<br /> Bonne soirée,<br /> Mo
Répondre
F
Bonsoir Mo,<br /> Je te les recommande vivement surtrout si tu aimes l'Histoire et les légendes qui s'y rattachent.
D
pourquoi pas ? mais déjà, quand on a tendance à perdre le fil des histoires trop complexes à multiples personnages...
Répondre
F
Bonjour Dominique<br /> en fait, des lectures que nous avons faites il y a longtemps, le plus souvent nous n'avons qu'un souvenir très succinct ; à la rigueur, nous savons encore à quel thème l'histoire se rattache, quant aux parcours et intrigues entre les personnages, cela reste souvent très confus, à moins que ce roman nous ait particulièrement marqué.<br /> D'autre part, dans la vie courante, nous rencontrons une grande quantité de personnes et l= c'est fou le nombre de souvenirs qui peuvent remonter à l'évocation du plus grand nombre d'entre elles .... <br /> J'ai bien aimé cette alternance de lecture et à chaque foi je retrouvais le fil de l'histoire que chacune contenait et ainsi je faisait des sacrés saut dans le temps ... un sacré voyage par delà les siècles !

Profil


FARFADET 86
Sexe : Homme
À propos : Retraités à Mirebeau* (Vienne), depuis janvier 2005, avec mon épouse, nous étions accompagnateurs de personnes handicapées mentales, ceci pendant 40 ans, dans un Foyer de Vie, en Haute Normandie.

Archives

langues

 

Hébergé par Overblog